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Jacques BELTRAN et Guillaume PARMENTIER Les �tats-Unis � l'�preuve de la vuln�rabilit� IFRI http://www.ifri.org/files/politique_etrangere/PE_4_01_Beltran.pdf

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GEOPO article geopolitique
french

Politique �trang�re 4/2001

Les �tats-Unis � l'�preuve de la vuln�rabilit� Jacques BELTRAN Guillaume PARMENTIER Jacques BELTRAN et Guillaume PARMENTIER

Au-del� du traumatisme psychologique, les attentats du 11 septembre auront des cons�quences profondes, � la fois sur la soci�t� am�ricaine et sur la politique �trang�re des �tats-Unis. Sur le plan interne, ce sont bien les valeurs du contrat social am�ricain qui pourraient �tre affect�es pour parer � la menace terroriste, qu'il s'agisse de la libert� de circulation ou des �changes. Sur le plan ext�rieur, on peut se demander si le multilat�ralisme affich� par l'Administration Bush depuis les �v�nements restera une constante de sa politique �trang�re, ou si l'unilat�ralisme fera son retour une fois que les n�cessit�s de la riposte coalis�e au terrorisme cesseront de se faire sentir. En mati�re de d�fense antimissile, il est probable que la fin du mythe de l'invuln�rabilit� am�ricaine et le souhait d'adopter une posture de d�fense renforc�e acc�l�rent ce programme. Quant aux relations transatlantiques, elles pourraient �tre affect�es par une plus grande d�volution de responsabilit�s aux Europ�ens en mati�re de s�curit� sur le Vieux continent, ainsi que par le r�le jou� par la Russie dans cette crise.

Il est d�licat de pr�tendre tirer des conclusions solides d'un �v�nement aussi traumatisant que les attaques du 11 septembre contre le World Trade Center et le Pentagone. Les effets aux Etats-Unis en seront largement psychologiques, et beaucoup d�pendra des circonstances qui suivront : poursuite de la terreur, r�actions des dirigeants et du peuple am�ricains, perception chez les Am�ricains d'un soutien ou d'une indiff�rence internationaux. Les r�flexions qui suivront doivent donc �tre interpr�t�es comme provisoires et sujettes � r�vision, l'objectif de cet article �tant avant tout de cerner les facteurs � l'oeuvre et les �volutions possibles.

L'analogie reprise par de nombreux observateurs entre les attentats du 11 septembre et l'attaque japonaise sur Pearl Harbor ne tient pas aux situations politique et strat�gique mais au choc psychologique ressenti par la population am�ricaine. La cons�quence premi�re et fondamentale de ces attentats qui ont provoqu� la mort de milliers de civils sur le sol am�ricain est bien d'avoir fait dispara�tre le mythe, largement partag� jusque-l� aux �tats-Unis, de l'invuln�rabilit�. M�me pour l'opinion publique am�ricaine, l'Am�rique n'est plus un sanctuaire.

Ce n'est certes pas la premi�re fois que les �tats-Unis sont frapp�s par des attaques terroristes. � maints �gards, les ann�es 1990 ont �t� celles de la d�couverte du ph�nom�ne terroriste, interne - dans les cas des attentats d'Oklahoma City et des Jeux olympiques d'Atlanta - mais aussi international : attaque au camion pi�g� contre le World Trade Center en 1993 (d�j� attribu�e � Ben Laden), contre la base am�ricaine de Dharan en Arabie Saoudite en 1996, contre les ambassades am�ricaines au Kenya et en Tanzanie en 1998 et contre la fr�gate USS Cole au Y�men en 2000.

Pourtant, les attaques du 11 septembre et la psychose entretenue par les d�couvertes d'enveloppes contenant du bacille du charbon donnent le sentiment qu'un cap a �t� franchi. Par le nombre tr�s �lev� de victimes, tout d'abord, qui rend d�risoire le qualificatif d'attentat et incite � �voquer un acte de guerre, m�me si l'absence d'ennemi identifi� ne rend pas ce terme vraiment satisfaisant. Par la nature des cibles, ensuite, symboles de la puissance militaire et �conomique des �tats-Unis, qui donnent la mesure des intentions et de l'id�ologie destructrice qui animent les terroristes. Par le mode op�ratoire choisi, enfin, qui accentue ce sentiment de grande vuln�rabilit� : en d�tournant des avions de ligne int�rieure ou - s'il s'av�re que les coupables sont les m�mes - en utilisant le syst�me postal comme vecteur de leurs attaques bact�riologiques, les terroristes ont d�tourn� l'utilisation des fondements de la soci�t� am�ricaine que sont la libre circulation, les �changes et la communication.

Au-del� du nombre effroyable de victimes, la peur suscit�e outre-Atlantique vient bien de ce que les terroristes ont infiltr� la nature m�me de la soci�t� am�ricaine. Pour les Am�ricains d�sormais, se prot�ger contre les terroristes suppose sinon de lutter contre eux-m�mes, du moins de se m�fier de leur propre mode de vie. Le point demeure encore ouvert de savoir, par exemple, si la loi antiterroriste sign�e par le pr�sident Bush le 26 octobre 2001 (apr�s une approbation ultra rapide de la part des deux Chambres) repr�sente un tournant d�cisif en mati�re de libert�s publiques. En accroissant la capacit� de l'�tat f�d�ral � intercepter les communications t�l�phoniques et �lectroniques, et en autorisant la d�tention des " non-citoyens ", c'est-�-dire de ceux qui ne sont pas d�tenteurs de la nationalit� am�ricaine, cette loi va � l'encontre d'un mouvement de lib�ralisation entam� au cours des ann�es 1960, et qui n'avait gu�re encore connu de recul. L'arrestation et la d�tention, sans acc�s � des avocats, de quelque mille r�sidents arabes posent �galement question.

Il est encore trop t�t pour dire quelle sera exactement, � long terme, la r�action des �tats-Unis, et quelles en seront toutes les cons�quences, en particulier parce que de nombreuses inconnues subsistent encore et que les �v�nements � venir pourraient influer consid�rable-ment sur l'�tat d'esprit de la population am�ricaine et de ses dirigeants. On ignore, par exemple, quelles seraient les cons�quences d'une deuxi�me vague d'attentats. � coup s�r, la tr�s forte tension ressentie aujourd'hui dans les villes se transformerait en r�elle psychose. Mais quelles en seraient les cons�quences politiques, �conomiques, psychologiques, tant au plan interne qu'international ?

De m�me, on ignore si l'opinion publique restera toujours favorable � l'engagement am�ricain en Afghanistan. Si le concept du " z�ro mort " semble avoir v�cu outre-Atlantique et si, d'apr�s de r�cents sondages, l'opinion publique semble pr�te � supporter le co�t d'une longue campagne, encore faudra-t-il qu'elle reste convaincue de l'ad�quation entre les moyens mis en oeuvre et l'objectif poursuivi, � savoir la destruction des r�seaux terroristes, entreprise longue et incertaine. Si de nouveaux attentats sont perp�tr�s aux �tats-Unis et que, par ailleurs, les forces am�ricaines s'enlisent en Afghanistan ou subissent des pertes importantes, il faudra s'attendre � ce qu'un nombre croissant d'Am�ricains remette en cause l'opportunit� d'une guerre lointaine, � l'heure o� les terroristes agissent sur le territoire national. Si, traditionnellement, la capacit� des opinions publiques � supporter les co�ts d'une op�ration militaire est li�e � la conviction de mener une guerre " juste ", elle est �galement fonction de la lisibilit� du conflit et de la conviction de mener une guerre " efficace ".

Enfin, au plan politique interne, on peut s'interroger sur la p�rennit� de l'union sacr�e qui r�unit d�mocrates, r�publicains et ind�pendants depuis le discours du pr�sident Bush devant le Congr�s, le 20 septembre. Si l'on a encore en m�moire l'image des repr�sentants et s�nateurs am�ricains applaudissant debout leur pr�sident, tous partis confondus, � l'issue d'un discours qualifi� � maintes reprises et sans surprise d'" historique ", il convient aussi de signaler les tensions qui sont apparues peu de temps apr�s entre d�mocrates et r�publicains quant au bien-fond� et au montant du plan de relance de l'�conomie am�ricaine annonc� par la Maison Blanche et m�me quant � la f�d�ralisation des contr�les de s�curit� dans les a�roports. Le pr�sident va-t-il toujours b�n�ficier des pleins pouvoirs qui lui ont �t� de facto accord�s le 11 septembre ? Ou faut-il s'attendre � ce que le jeu des partis reprenne son cours, en particulier � l'approche des �lections de mi-mandat, avec - rappelons-le - l'enjeu d'un possible basculement de l'ensemble du Congr�s sous majorit� d�mocrate ?

Autant de questions dont les r�ponses sont encore inconnues et qui d�pendront dans une large mesure de facteurs exog�nes. On ne peut donc que se contenter, � ce stade, d'�mettre des hypoth�ses et tenter d'entrevoir l'impact que cette d�couverte de la vuln�rabilit� pourrait avoir, non seulement sur la soci�t� am�ricaine, mais �galement - par voie de cons�quence - sur la perception que les �tats-Unis auront de leur relation avec le reste du monde. Il se peut en effet qu'au-del� de la riposte militaire, les attentats du 11 septembre aient provoqu� une r�action en cha�ne qui, de l'impact psychologique interne aux cons�quences sur la politique �trang�re am�ricaine, pourrait peser lourd sur l'�volution du syst�me international de l'apr�s-guerre froide, y compris sur la nature de la relation transatlantique.

De la vuln�rabilit� � la peur de l'�tranger

Le sentiment d'invuln�rabilit� du peuple am�ricain n'�tait �videmment pas total, m�me avant le 11 septembre. Les sondages du Chicago Council on Foreign Relations, dont John Rielly a r�guli�rement comment� les r�sultats dans Politique �trang�re, montrent que les Am�ricains craignaient dans une certaine mesure les cons�quences du terrorisme sur leur s�curit�. L'exp�rience de la tentative de renforcement de la s�curit� a�rienne, men�e par l'Administration Clinton d'ao�t 1996 � f�vrier 1997, montre cependant que cette crainte �tait demeur�e diffuse. La White House Commission on Aviation Safety and Security, pr�sid�e par le vice-pr�sident Al Gore, avait en effet conclu � la n�cessit� de renforcer de fa�on significative les conditions de contr�le � bord des avions. Devant la perspective d'une moindre rotation de ceux-ci, qui aurait r�duit leur rentabilit�, les compagnies a�riennes, et leurs relais au Congr�s, avaient r�sist� � cette tentative. Le compromis auquel sont parvenues les autorit�s am�ricaines fut significatif d'un �tat d'esprit trop optimiste quant � la capacit� des �tats-Unis � demeurer invuln�rables. Les nouvelles consignes de s�curit� ont en effet �t� appliqu�es aux vols en provenance ou � destination de l'�tranger, mais les vols int�rieurs en ont �t� exempt�s. Or, les quatre avions d�tourn�s le 11 septembre assuraient pr�cis�ment des vols int�rieurs. Une confiance sociale excessive dans une ligne de d�marcation entre God's own country et un �tranger plus dangereux a ainsi facilit� la t�che des terroristes.

En bonne logique, les �v�nements du 11 septembre devraient r�duire cette c�sure mentale, contribuant � persuader les Am�ricains que leur sort est ins�parable de celui du reste du monde. La d�licate t�che des responsables politiques consistera � traduire ce point de vue g�n�ral en r�sistance aux groupes de pression organis�s qui souhaitent soustraire le territoire am�ricain � certaines mesures restrictives. Un tel conflit pourra se manifester � l'avenir aussi bien en mati�re de libert�s publiques qu'en mati�re de port d'armes, par exemple.

En effet, cette d�couverte de la vuln�rabilit� pourrait bien alimenter un sentiment de " peur de l'�tranger " qui d�passerait la traditionnelle m�fiance � l'�gard des foreign entanglements et pourrait se traduire, � terme, non seulement par une r�ticence � l'�gard d'une implication des �tats-Unis dans les crises ext�rieures, mais �galement par un r�flexe de fermeture et de repli sur soi de la soci�t� am�ricaine. Certes, l'effet imm�diat du 11 septembre a �t� d'ouvrir les yeux de tous les Am�ricains sur le r�le que le reste du monde pourrait avoir sur le sort de la nation am�ricaine, mais la r�alit� reprendra ses droits. Rapidement, la tendance des m�dias � ne se consacrer pour l'essentiel qu'aux affaires locales surgira de nouveau. L'attention � l'�tranger se rel�chera, comme ce fut le cas pendant les conflits pr�c�dents auxquels ont particip� le pays. Surtout, dans ce contexte, si l'opinion, les groupes de pression et le secteur politique am�ricains sont d��us par les r�sultats de l'op�ration, le risque d'une r�surgence d'une m�fiance g�n�rale � l'�gard de tout ce qui provient de l'�tranger se manifestera, et peut-�tre avec plus de force encore que par le pass�.

La mise entre parenth�ses temporaire des int�r�ts minoritaires dans la d�finition de la politique �trang�re

L'une des caract�ristiques essentielles du syst�me politique am�ricain, et en particulier du processus d'�laboration de la politique �trang�re, est que cette politique internationale est - dans une large mesure - le fruit de consid�rations internes. Le r�le du Congr�s et le poids des lobbies (�conomiques et ethniques, en particulier) font que la politique internationale de la premi�re puissance mondiale est souvent prise en otage par des groupes d'int�r�ts puissants, organis�s et disposant de moyens financiers consid�rables leur permettant de peser sur le jeu �lectoral, et donc sur les choix effectu�s par les �lus.

Or, les attentats du 11 septembre pourraient avoir comme cons�quence d'inverser pendant au moins un temps l'ordre des priorit�s : les groupes d'int�r�ts continueront certes � exercer des pressions pour faire valoir les projets qu'ils d�fendent, mais ceux-ci seront largement contrebalanc�s ou renforc�s, selon les cas, par les imp�ratifs de s�curit� nationale et de la lutte contre le terrorisme. Ainsi, l'importance des enjeux internationaux actuels rendrait la politique �trang�re des �tats-Unis moins sensible aux int�r�ts minoritaires, pr�cis�ment parce que - de mani�re indiscutable - l'int�r�t national est en jeu.

Il ne faut d�s lors pas s'�tonner de voir les �tats-Unis revenir de mani�re spectaculaire sur des programmes de coop�ration internationale qu'ils avaient jusqu'� pr�sent rejet�s, au motif qu'ils mettaient en cause la souverainet� et les int�r�ts am�ricains. Le programme de l'OCDE de lutte contre le blanchiment d'argent et les paradis fiscaux - dont les �tats-Unis s'�taient d�sengag�s juste avant les attentats sous la pression du lobby bancaire soucieux d'�viter aux banques am�ricaines des r�glementations et des proc�dures impos�es de l'ext�rieur - a ainsi �t� relanc� par Washington. On peut aussi s'attendre, selon le m�me sch�ma, � ce que les Am�ricains manifestent un int�r�t nouveau pour l'accord sur le contr�le des armes � petit calibre, rejet� il y a quelques mois � peine par le Congr�s sous la pression de la puissante National Rifle Association.

Pour autant, il ne faut pas se dissimuler que l'�volution inverse est �galement possible. Si la campagne actuelle en Afghanistan ne parvient pas � obtenir des r�sultats probants dans un d�lai raisonnable, on pourrait assister � terme � un choc en retour tendant � raviver la m�fiance intuitive du peuple am�ricain envers l'�tranger. Ceci ne m�nerait pas � un quelconque " nouvel isolationnisme ", au demeurant parfaitement irr�alisable, mais pourrait avoir pour effet de renforcer encore le poids des d�terminants internes dans les d�cisions des �tats-Unis en mati�re internationale, de limiter encore davantage la marge de manoeuvre de l'ex�cutif face au Congr�s et, ce faisant, de renforcer le r�le des groupes de pression. La politique �trang�re am�ricaine en serait rendue plus impr�visible, oscillant entre des p�riodes de retrait et des pouss�es d'interventionnisme d'autant plus fortes qu'elles seraient dict�es par des contingences int�rieures. La partie qui se joue avec la campagne actuelle est donc d'une importance capitale pour l'engagement am�ricain futur dans les affaires internationales. � ce titre, elle peut conditionner l'avenir du syst�me international dans son ensemble.

Une nouvelle posture de d�fense ?

La lutte contre le terrorisme est devenue l'enjeu num�ro un du mandat de George W. Bush, et l'on peut s'attendre, au moins � court terme, � ce que la plupart des choix de politique int�rieure et internationale soient examin�s � l'aune de cet objectif. Ceci devrait avoir des cons�quences sur la posture de d�fense des �tats-Unis.

La premi�re cons�quence pourrait �tre pr�cis�ment un renforcement de cette posture de d�fense, au d�triment des strat�gies de projection de forces. En d'autres termes, la puissance militaire des �tats-Unis verrait ses missions recentr�es sur la d�fense du territoire am�ricain et de ses bases et int�r�ts � l'�tranger, au d�triment d'une utilisation de ces forces � des fins d'intervention ext�rieure. Par ailleurs, la tendance ne devrait pas �tre celle d'un abandon des syst�mes de d�fense reposant avant tout sur la technologie, mais au contraire d'un renforcement de ces syst�mes en m�me temps qu'un d�veloppement du facteur humain. En d'autres termes, tout ce qui servira la d�fense du pays sera consid�r� comme indispensable.

Ainsi, contrairement � ce que l'on pourrait l�gitimement conclure � la suite des attentats, les attaques terroristes du 11 septembre qui - loin d'�tre men�es � l'aide de missiles intercontinentaux- ont �t� perp�tr�es par d�tournement de moyens civils, n'ont pas rendu caduc le programme de d�fense antimissile mais pourraient bien avoir renforc� sa l�gitimit�. Loin d'�tre per�ue comme un contre-exemple de l'utilit� d'un tel syst�me, la d�fense antimissile pourrait sortir renforc�e de cette crise, ses partisans insistant pr�cis�ment sur le risque qu'un groupe de terroristes mette la main sur des missiles et les lance contre le territoire am�ricain. C'est ainsi que, quelques jours seulement apr�s les attentats, les s�nateurs d�mocrates ont d�cid� de lever leurs objections au niveau de d�pense portant sur la d�fense antimissile propos� par l'Administration pour 2002. Depuis le 11 septembre, l'argument des Europ�ens selon lequel les Am�ricains auraient une f�cheuse tendance � surestimer la menace, � des fins de d�veloppement industriel, est de plus en plus difficile � avancer. Ces attentats ont ainsi fourni une caution morale � tout programme militaire ou civil visant � accro�tre la protection du territoire et des int�r�ts des �tats-Unis dans le monde.

La seconde cons�quence, d�coulant directement de la premi�re, pourrait �tre une augmentation sensible du budget de d�fense am�ricain. En d�pit du fait que les �tats-Unis d�pensent d�j� 320 milliards de dollars par an pour leur d�fense, soit davantage que les neuf pays les plus d�pensiers en mati�re militaire apr�s eux, on peut s'attendre � ce que les responsables am�ricains se montrent favorables � de nouvelles augmentations. Les chiffres oscillent � l'heure actuelle entre 20 et 40 milliards de dollars d'augmentation dans le prochain budget. Par ordre de comparaison, le budget militaire annuel de la France est de moins de 30 milliards de dollars.

Une telle attitude ne sera d'ailleurs pas sans poser certains probl�mes de fond. En premier lieu se pose naturellement la question des moyens. Il est clair qu'une posture de d�fense renforc�e co�te cher et qu'� l'heure o� les �tats-Unis connaissent un ralentissement de leur croissance et que l'Administration Bush a d�cid� d'une r�duction importante des imp�ts, on peut l�gitimement mettre en doute la capacit� des �tats-Unis � assumer un tel choix. Du moins, des choix budg�taires d�licats seront-ils exig�s au d�triment d'autres secteurs, comme ceux de l'�ducation et de la sant�.

Le deuxi�me probl�me est celui de la hi�rarchisation des priorit�s. � force de d�penser sans discrimination, les �tats-Unis risquent pr�cis�ment de se priver d'une r�elle politique de d�fense, c'est-�-dire d'une strat�gie qui - apr�s avoir hi�rarchis� les menaces - d�veloppe les moyens d'y faire face, en fonction des besoins relatifs. Une politique de d�fense tous azimuts court paradoxalement le risque de ne pas voir venir la menace.

Un multilat�ralisme de circonstance

Certains observateurs ont cru voir dans les premi�res d�clarations et d�cisions de l'Administration Bush au lendemain des attentats un changement de comportement important. En tentant de constituer une coalition la plus large possible, les �tats-Unis ont pu donner le sentiment de rompre avec l'unilat�ralisme initial de cette Administration. Washington a ainsi fait appel � ses alli�s - en particulier europ�ens - en leur demandant un soutien sans faille pour mener � bien une riposte � laquelle ils ne manqueraient pas d'�tre associ�s. Cette volont� de constituer une coalition internationale a ensuite �t� �tendue � l'ensemble des pays du monde par le biais de l'ONU, en demandant au Conseil de s�curit� de voter une r�solution condamnant les attentats et l�gitimant une riposte militaire. Cette d�marche a heureusement surpris ceux qui craignaient de voir l'ONU mise de c�t�, comme ce fut le cas lors de la campagne a�rienne du Kosovo, et a pu donner le sentiment que les �tats-Unis avaient renonc� - dans cette crise tout du moins - � l'action unilat�rale. La nature de la menace � laquelle l'unique superpuissance est confront�e rend de facto indispensable une coop�ration internationale et force donc les �tats-Unis � agir en concertation avec leurs principaux alli�s.

Faut-il pour autant consid�rer ces gestes comme des signes d'un multilat�ralisme retrouv� ? Rien n'est moins s�r et il convient sans doute d'�tre tr�s prudent en la mati�re. Si l'on admet en effet que les �tats-Unis - � la suite de ces attentats - vont mettre en oeuvre une politique visant essentiellement � �viter que de telles attaques ne se produisent � nouveau, on peut s'attendre � ce que ce multilat�ralisme apparent ne soit que de circonstance et ne masque en r�alit� une politique de d�fense de l'int�r�t national primant sur toutes les autres consid�rations. Ainsi, les �tats-Unis ne feraient aujourd'hui appel � une coalition que dans la mesure o� celle-ci a un effet rassurant et qu'elle est utile pour tenter d'adoucir les cons�quences internationales de leur riposte militaire. Mais, comme cela a d�j� �t� signal� pr�c�demment, on peut tout aussi bien s'attendre � ce que ce multilat�ralisme soit d�nonc� par les responsables am�ricains d�s lors qu'il serait per�u comme un obstacle � la d�fense d'un int�r�t sup�rieur. Les �tats-Unis seront d'autant plus incit�s � ne compter que sur eux-m�mes qu'ils auront plac� la lutte antiterroriste au premier rang de leurs priorit�s. Et, dans cette perspective, l'adage multilateralist if possible, unilateralist when necessary devrait �tre particuli�rement d'actualit�.

Au-del� de la riposte militaire : les cons�quences diplomatiques

La riposte militaire en cours n'est d'ailleurs qu'une �tape dans la r�action des �tats-Unis aux attentats qui ont endeuill� la premi�re puissance mondiale. Le pr�sident am�ricain l'a fait savoir de mani�re tr�s claire en comparant cette lutte antiterroriste de longue haleine � l'affrontement bipolaire de la guerre froide, qui avait exig� la mise en oeuvre de moyens tr�s vari�s, allant de la puissance militaire � l'influence culturelle, en passant par l'action diplomatique et les moyens �conomiques. Les Europ�ens ne peuvent que se r�jouir de cette attitude patiente qui exclut a priori toute r�plique militaire massive et entend privil�gier l'action de long terme. Mais ils auraient tort de croire que cette riposte am�ricaine se fera " toutes choses �gales par ailleurs ". Les attentats du 11 septembre pourraient, au-del� de l'action militaire en cours et des mesures politiques et �conomiques adopt�es, avoir des cons�quences majeures sur l'ensemble du syst�me international, par le biais des inflexions qu'elles pourraient produire dans l'attitude internationale des �tats-Unis. L'asym�trie du syst�me international actuel fait que toute modification de la posture internationale de l'unique superpuissance aura n�cessairement des r�percussions sur l'ensemble des relations inter�tatiques. Il faut en particulier s'attendre � ce que les �tats-Unis red�finissent leur strat�gie � l'�gard d'un certain nombre de pays. En proclamant que tous les pays du monde doivent d�cider s'ils sont avec les �tats-Unis ou avec les terroristes, le pr�sident Bush a volontairement restreint l'alternative, montrant bien que les coalitions n'auront d'int�r�t pour les Am�ricains que si les autres membres sont en accord avec la strat�gie �labor�e par Washington. Mais cette d�claration aura surtout pour effet de rendre les ambigu�t�s strat�giques de moins en moins tenables.

Ainsi, par effet presque m�canique, les attentats du 11 septembre ont provoqu� des rapprochements spectaculaires entre les �tats-Unis et certains pays comme la Russie, l'Inde et dans une moindre mesure la Chine. D'autres, comme la Libye ou Cuba, jadis ouvertement hostiles � l'�gard de Washington, ont surpris par leurs d�clarations de solidarit�. Bien entendu, ces d�clarations de compassion ne sont pas d�nu�es d'arri�re-pens�es, mais les attentats terroristes ont sans nul doute �galement fournit aux dirigeants de ces �tats l'argument de poids susceptible de faire accepter, au plan int�rieur, un rapprochement difficilement envisageable auparavant. Surtout, les attentats terroristes qui ont frapp� les �tats-Unis vont sans doute provoquer un d�bat interne et international sur l'attitude des Am�ricains � l'�gard d'un certain nombre de pays.

C'est le cas tout d'abord de la cat�gorie des rogue states, dans laquelle se retrouvent, p�le-m�le et sans aucune justification s�rieuse, des �tats aussi divers que Cuba, l'Iran, l'Irak, la Libye ou la Cor�e du Nord. Comme il a �t� vu pr�c�demment, nombreux sont ceux qui ont exprim� leur solidarit� � l'�gard des �tats-Unis, rompant ainsi avec leur rh�torique anti-am�ricaine habituelle. Or, ces marques de soutien pourraient bien remettre en cause l'existence m�me de cette cat�gorie, dont l'un des crit�res �tablis par son concepteur, Anthony Lake, alors conseiller national de s�curit� du pr�sident Clinton, est pr�cis�ment l'animosit� � l'encontre de Washington. Si l'une des nombreuses cons�quences du 11 septembre est un rapprochement entre les �tats-Unis et certains rogue states, alors la liste de ces derniers devra �tre revue en cons�quence. Le cas de l'Iran est, � cet �gard, significatif. Si les tensions politiques internes (entre le pr�sident r�formateur Khatami et l'imam Khamenei) et le passif iranien en mati�re de soutien au terrorisme international peuvent faire douter de l'�ventualit� d'un rapprochement rapide avec les �tats-Unis, on ne peut pas non plus exclure que la communaut� d'int�r�t qui lie Am�ricains et Iraniens face au r�gime des Talibans ne serve de base � un rapprochement � plus long terme. En ce sens, les attentats du 11 septembre pourraient servir d'acc�l�rateur � une lente �volution, entam�e sous Clinton. Toute la question, pour l'Iran comme pour les autres pays qualifi�s de rogue states, ainsi que pour la Russie, l'Inde et la Chine, est de savoir si ces rapprochements seront durables ou si, une fois le probl�me r�gl� en Afghanistan, les antagonismes reprendront leur cours.

Au-del� de ces am�liorations des relations diplomatiques, dont il reste � savoir si elles sont circonstancielles ou durables, la logique voudrait que les attentats du 11 septembre am�nent les �tats-Unis � revoir leurs strat�gies au Proche-Orient, et plus particuli�rement � l'�gard d'Isra�l, de l'Arabie Saoudite et de l'Irak. Il est d'ailleurs notable � ce propos de noter combien les �tats-Unis, au cours des derni�res ann�es, se sont rendus politiquement d�pendants des �tats qui sont d�pendants militairement � leur �gard et dont ils assurent la protection. D'une relation qui aurait d� �tre une relation de d�pendance � sens unique, ces �tats alli�s des �tats-Unis ont su faire une relation de d�pendance r�ciproque.

C'est naturellement vrai d'Isra�l, prot�g� par le soutien de l'opinion publique am�ricaine qui voit en lui, de fa�on quelque peu caricaturale, un pays aux valeurs occidentales confront� � des pays arabes aux valeurs diff�rentes. Cette d�pendance est li�e � ce partage culturel, comme on l'a vu chaque fois que la politique isra�lienne s'en �loignait, que ce soit face au Liban ou sous la mandature N�tanyahou ou, plus r�cemment, avec la politique d'Ariel Sharon � l'�gard des civils palestiniens. Dans chacun de ces cas, le soutien du groupe de pression proisra�lien, incarn� par l'AIPAC, ne s'est pas transform� en soutien de l'opinion publique am�ricaine. Cependant, dans la plupart des situations, la d�pendance politique des �tats-Unis � l'�gard de leur alli� isra�lien demeure.

Les signes d'une inflexion modeste de la position am�ricaine � l'�gard du conflit isra�lo-palestinien sont pourtant, peut-�tre, d�j� perceptibles. Les d�clarations du pr�sident Bush en faveur de la cr�ation d'un �tat palestinien et les pressions exerc�es � l'encontre d'Isra�l pour �viter l'escalade militaire ont rompu avec l'attitude r�serv�e observ�e jusque-l� par l'Administration r�publicaine. Il devrait �tre clair d�sormais que les attentats du 11 septembre ont conduit � une communaut� d'int�r�t plus visible que par le pass� entre certains responsables palestiniens et am�ricains, ces derniers craignant avant tout d'�tre per�us comme engag�s dans un " conflit de civilisation " contre le monde musulman. Il est encore difficile aujourd'hui de savoir si ces �v�nements auront marqu� une rupture majeure dans les relations entre Washington et Tel-Aviv. Mais ils auront sans doute provoqu� outre-Atlantique un d�bat qui devrait conduire un nombre croissant d'observateurs � s'interroger sur le bien-fond� de la politique suiviste des �tats-Unis � l'�gard du conflit isra�lo-palestinien, ce qui pourrait donner plus de jeu � la politique am�ricaine sur ce dossier.

Il en est de m�me, pour des raisons bien diff�rentes, � l'�gard de l'Arabie Saoudite et des monarchies p�troli�res du Golfe, qui tiennent au r�le majeur que jouent ces pays en mati�re d'approvisionnement �nerg�tique des �tats-Unis et de leurs alli�s, et de la conscience qu'il n'existe pas d'alternative ais�ment rep�rable aux r�gimes actuels. Pourtant, le r�le actif jou� par Riyad dans le soutien financier et id�ologique au d�veloppement d'un islamisme radical et parfois extr�miste irr�m�diablement hostile � l'Occident pourrait l�gitimement avoir modifi� l'attitude de Washington � son �gard. La question demeure de savoir si la d�pendance politique dans laquelle la diplomatie am�ricaine s'est plac�e � l'�gard de ses alli�s au Moyen-Orient rendra possible les �volutions n�cessaires.

Enfin, bien qu'aucune d�claration n'ait officiellement mis en cause l'Irak dans les attentats du 11 septembre ou dans les envois de lettre contenant de l'anthrax, les attaques terroristes subies par les �tats-Unis ont �t� l'occasion de remettre sur la table la strat�gie am�ricaine � l'�gard de Bagdad. L'Administration r�publicaine - ou plus exactement le secr�taire d'�tat Colin Powell - s'�tait illustr�e d�s le d�but du mandat de George W. Bush par ses initiatives visant � modifier le r�gime de sanctions dans le sens de l'adoption de mesures plus cibl�es, �pargnant les populations civiles. Cette initiative avait �t� consid�r�e � l'�poque, en particulier au Pentagone, comme le signe avant-coureur d'une mesure d'assouplissement risqu�e de la position am�ricaine vis-�-vis de Bagdad. Depuis le 11 septembre, les voix des partisans d'un recours � la force se sont fait entendre au plus haut niveau (l'adjoint du secr�taire � la D�fense, Paul Wolfowitz), ceux-ci voulant saisir l'occasion de l'op�ration militaire en Afghanistan pour se d�barrasser de Saddam Hussein. En d�pit de leurs pressions, la Maison-Blanche semble jusqu'� pr�sent avoir compris les risques qu'une telle initiative ferait peser sur la coalition internationale, en particulier dans les pays musulmans et chez certains Europ�ens, dont la France. Mais rien ne permet, � ce stade, de pr�juger des rapports de force � venir au sein de l'Administration et du Congr�s. On peut s'attendre, en particulier, � ce que des analogies soient �tablies entre l'Irak et l'Afghanistan, o� un soutien militaire � l'opposition (Alliance du Nord) a permis un changement de r�gime � Kaboul.

L'impact sur la relation transatlantique

Cette red�finition des relations entre certains �tats et la premi�re puissance mondiale ne manquera pas de concerner les Europ�ens eux-m�mes. Non que l'alliance transatlantique soit remise en cause dans ses fondements, mais parce que le bouleversement des priorit�s strat�giques que ces attentats pourraient provoquer outre-Atlantique posera in�vitablement la question des priorit�s europ�ennes.

Cette crise devrait tout d'abord relancer le d�bat sur l'implication des �tats-Unis dans la s�curit� de l'Europe et, plus largement, sur le partage du fardeau pour assurer la s�curit� des membres de l'OTAN, y compris � l'�gard de la menace terroriste. Il est en effet fort probable que cette crise ait un effet imm�diat : acc�l�rer la d�volution aux Europ�ens de la responsabilit� d'assurer la s�curit� dans les Balkans. On peut ainsi s'attendre - apr�s une telle attaque - � ce que les �tats-Unis placent la lutte antiterroriste au premier rang de leurs priorit�s et que le r��quilibrage au profit du Moyen-Orient et de l'Asie s'en trouve acc�l�r�, au d�triment de l'Europe. Apr�s les attaques sur le sol am�ricain, l'importance de la stabilit� en Mac�doine a sans doute �t� relativis�e � Washington. Les demandes faites aux Europ�ens par le Pentagone de compenser les retraits �ventuels de troupes am�ricaines des contingents internationaux en Bosnie et au Kosovo repr�sentent sans doute un signe annonciateur de mouvements futurs.

D'une mani�re g�n�rale d'ailleurs, la relation transatlantique va probablement conna�tre des modifications sensibles du fait de l'impact du 11 septembre. Sans s'avancer � l'exc�s, on peut faire le pari que deux changements sont � pr�voir. D'une part, la guerre du Kosovo avait convaincu les �tats-majors am�ricains que l'OTAN pouvait repr�senter une g�ne pour la conduite d'op�rations militaires, du fait du contr�le multilat�ral et pointilleux effectu� par le Conseil Atlantique sur celle-ci. Le r�sultat de cette m�fiance s'est manifest� avec force depuis le 11 septembre, puisque la d�cision prise par les Alli�s d'invoquer pour la premi�re fois l'article 5 du trait� de Washington n'a �t� suivie que de mesures symboliques. Les Am�ricains ont pr�f�r� mener une guerre nationale sous le couvert d'une coalition internationale, et en choisissant � la carte parmi les Alli�s ceux qui pouvaient leur apporter une contribution utile, plut�t que de s'appuyer sur l'appareil collectif de l'OTAN. D'organisation politico-militaire, l'OTAN est en passe de devenir un r�servoir de moyens au service des ses membres dans des formations diverses.

En second lieu, le r�le jou� par la Russie dans le conflit actuel, et en particulier l'habilit� du pr�sident Poutine et sa capacit� � lever les objections internes � une attitude de soutien envers la campagne men�e par les �tats-Unis ont des chances de relancer la relation entre l'OTAN et la Russie, qui restait peu satisfaisante. Le processus induit par l'Acte fondateur OTAN-Russie en 1997 devrait �tre r�activ�. Cela pourrait changer la donne en ce qui concerne l'�largissement futur de l'OTAN. L'Administration Bush semble en effet d�termin�e � obtenir un �largissement incluant au moins l'un des �tats baltes lors du sommet de l'Alliance de 2002, qui se tiendra � l'automne � Prague. Cependant, si la Russie continue � soutenir les Am�ricains dans l'entreprise dans laquelle ils se sont lanc�s, il est fort improbable que cet �largissement puisse �tre conduit sans tenir compte des positions de Moscou. Il serait en effet hasardeux de prendre une mesure consid�r�e comme peu amicale par un alli� dans la lutte contre le terrorisme. Quels que soient les sentiments antirusses qui persistent dans l'Administration, au Congr�s et dans l'appareil militaire, il para�t difficilement envisageable, pour des raisons politiques, de laisser � la Russie le r�le d'unique �tat europ�en n'ayant pas vocation � participer � l'Alliance atlantique. On pourrait donc envisager que la liste de pays susceptibles de participer au prochain �largissement soit effectivement approuv�e � Prague, mais que les pays de l'OTAN ajoutent que la candidature de la Russie pourrait �galement �tre envisag�e � terme. En attendant, un renforcement de la consultation OTAN-Russie serait d�fini et mis en oeuvre. Tel est probablement le sens des paroles sibyllines du pr�sident Poutine, prononc�es le 4 octobre 2000 � Bruxelles : " Il est possible de voir (l'�largissement de l'OTAN) sous un jour compl�tement nouveau - si l'OTAN prend une teinte diff�rente et devient une organisation politique. "

L'instrument principal de la relation transatlantique est donc probablement appel� � se transformer profond�ment. Tel n'est pas, d'un point de vue europ�en, la moindre cons�quence des attaques du 11 septembre.