Petit essai pour montrer que la polys�mie n'est pas un sens interdit ILF ILF r�cup�ration du fichier au format texte Nikola Tulechki cr�ation du header Mai Ho-Dac pretraitement et balisage du texte selon la TEI P5 Nikola Tulechki 10/09/2009 CLLE-ERSS
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exploitable et diffusable pour la communaut� scientifique

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Georges Kleiber Quel avenir pour la lexicographie fran�aise ? ILF http://www.linguistiquefrancaise.org/content/view/217/282/lang,fr/

ANNODIS

projet financ� par l'ANR (Agence Nationale pour la Recherche), CNRS, 2007-2010, dirig� par Maire-Paule P�ry-Woodley, universit� de Toulouse - UTM

objectif : cr�ation d'un corpus de fran�ais �crit annot� discursivement

encodage des textes selon la norme de la Text Encoding Initiative, TEIP5

http://www.tei-c.org/release/doc/tei-p5-doc

cmlf article scientifique linguistique lexique(s)
french
Petit essai pour montrer que la polys�mie n'est pas un sens interdit Georges Kleiber Universit� Marc Bloch de Strasbourg & EA 1339 LILPA-Scolia kleiber@umb.u-strasbg.fr Il n'y a qu'un sens, mais il est ... multiple.
Introduction

Il n'est gu�re besoin de le souligner : les affaires de la polys�mie sont aujourd'hui, � l'image m�me du concept, ambigu�s. Un seul point semble faire l'unanimit� : tout le monde (ou presque) accepte qu'une expression linguistique puisse pr�senter une variation d'interpr�tations selon le contexte. Mais faut-il y voir de la polys�mie ou non ? C'est l� que les analyses et les r�ponses s'av�rent discordantes et qu'il convient de faire le point. Non pas en proposant une ni�me th�orie, forc�ment � copernicienne �, de la polys�mie, mais en (r�)examinant, dans le droit fil de nos travaux ant�rieurs (Kleiber, 1996, 1999, 2000, 2005 et 2006), les tenants et les aboutissants de l'affaire.

Nous nous proposons de reprendre le probl�me de la multiplicit� de sens associ�e � une unit� lexicale pour essayer de voir quelles sont les propri�t�s que doivent pr�senter de tels sens pour m�riter le label de polys�mie ou non. Nous le ferons en deux �tapes : apr�s un tour de chauffe observationnel g�n�ral, nous mettrons en avant dans la premi�re partie les deux conditions auxquelles doivent satisfaire les diff�rentes lectures d'une unit� lexicale pour pouvoir �tre consid�r�es comme �tant des sens de l'unit� lexicale elle-m�me : la non-unifiabilit� et l'autonomie par rapport au discours. L'hypoth�se que nous d�fendrons est que la variation interpr�tative d'une unit� lexicale ne peut �tre polys�mique, c'est-�-dire port�e au cr�dit de l'unit� lexicale, que si les diff�rentes lectures en jeu ont deux propri�t�s particuli�res : elles doivent �tre, d'une part non unifiables, et, d'autre part, robustes ou fortes, c'est-�-dire autonomes par rapport aux discours dans lesquels elles se manifestent. Nous essaierons, comme l'indique le titre, de montrer, dans la seconde partie, qu'il existe de tels sens. Nous recourrons � des tests syntagmatiques et paradigmatiques pour prouver le caract�re empirique de ces deux propri�t�s et, partant, pour l�gitimer de fa�on non artificielle, la pertinence linguistique du ph�nom�ne.

Unit� lexicale et pluralit� de sens
Observations pr�liminaires

On peut accepter comme point de d�part provisoire que la polys�mie n�cessite :

-i- que l'on reconnaisse qu'une forme lexicale (un mot pour aller vite) pr�sente plusieurs sens -ii- que ces sens soient reli�s d'une mani�re ou d'une autre entre eux.

L'absence de la condition -ii-, qui d�coule directement de la d�finition de la polys�mie par Br�al (1897) comme �tant la cons�quence synchronique des changements de sens, nous met en pr�sence de ce qu'on appelle habituellement l'homonymie.

Une premi�re observation est � faire � ce niveau. On constate dans l'abondante litt�rature sur la multiplicit� des interpr�tations une int�ressante diff�rence entre le traitement de l'homonymie et celui de la polys�mie. Si les ph�nom�nes polys�miques sont bien souvent remis en cause, les cas d'homonymie se trouvent g�n�ralement �pargn�s, m�me si comme pour voler ou gr�ve il s'agit � l'origine d'un r�el changement de sens. L'affaire peut sembler anodine. Elle l'est toutefois beaucoup moins, si l'on prend en compte le fait que ce qui pousse � nier les faits de polys�mie devrait aussi, en grande partie, servir pour remettre en cause les faits d'homonymie. C'est la position � laquelle est amen� tout logiquement, dans une perspective cognitiviste, le Cruse de 2004 (Croft et Cruse, 2004, 109) : � bounded sense units are not a property of lexical items as such ; rather they are construed at the moment of use �. Et un mot homonymique comme bank, dans une vision constructiviste du sens, ne se divisera plus imm�diatement en bank-'rive' et bank-'�tablissement financier', mais se verra associer un seul purport ou mat�riau conceptuel qui repr�sente l'apport s�mantique du mot � la construction de l'interpr�tation, les sens de 'rive' et de 'banque' �tant eux-m�mes des unit�s de sens construites � partir du � purport � et de conventions. On peut se demander alors pourquoi ceux qui s'en prennent � la polys�mie n'attaquent pas avec la m�me vigueur l'homonymie. La raison, � notre avis, r�side dans la pr�sence de la condition -ii- : l'existence de liens (de relations) entre les diff�rents sens d'une m�me unit� lexicale est un facteur qui pr�dispose � et qui donc favorise la recherche d'une unit� s�mantique sup�rieure d�gradant les diff�rents sens relev�s au rang de simples interpr�tations de l'aval discursif. Si, par contre, l'�cart entre les diff�rentes interpr�tations n'est pas per�u ou donn� comme sous-tendu par un lien, on ne sent pas pouss� ou autoris� � chercher un amont unificateur qui d�ferait la situation polys�mique en r�duisant ces diff�rentes interpr�tations � des effets de l'amont en question. .

Une deuxi�me observation concerne le niveau o� s'exerce la critique du fait polys�mique. Si on part de la conjonction d�finitionnelle provisoire -i- et -ii-, la polys�mie peut �tre remise en cause, soit en critiquant -i-, soit en critiquant -ii-. Dans le premier cas, celui o� -i- est faux, mais o� -ii- subsiste, les relations de -ii- sont � porter au cr�dit de la construction de lectures qui ne sont plus intrins�quement attach�es � l'expression : on refuse la polys�mie, mais on conserve les emplois. C'est la position critique classique. La seconde position, celle o� l'on conserve -i-, mais o� l'on refuse -ii-, revient � transformer un cas de polys�mie en un cas d'homonymie. Elle est, c'est significatif, beaucoup moins fr�quente, quoique tout � fait envisageable, comme en t�moignent les variations lexicographiques en ce domaine. On peut fort bien s'interroger, par exemple, sur la persistance ou non d'une relation synchronique entre le sens de blaireau-'animal' et blaireau-'brosse pour la barbe'.

Nos deux observations tirent dans la m�me direction : elles montrent que c'est avant tout le point -i-, celui de la pluralit� du sens assign�e � une m�me forme, qui se r�v�le primordial. Autrement dit, la question essentielle n'est pas tellement celle de l'existence ou non de relations - probl�matique qui est incontestablement int�ressante � un autre point de vue et � un autre niveau, celui des changements de sens et des universaux qui peuvent �tre impliqu�s, des potentialit�s organisationnelles - mais celle de l'existence multiple de sens associ�s � une forme, qu'il s'agisse d'homonymie ou de polys�mie, m�me si nous nous pla�ons volontairement, �tant donn� notre premi�re observation, dans le cadre des vocables qui peuvent pr�tendre concourir pour le label � polys�mique �. C'est � ce niveau-l� qu'il faut alors poser la question fondamentale : est-ce qu'on peut associer � une unit� lexicale plusieurs sens ou non ? Autrement dit encore : est-ce une propri�t� des unit�s lexicales, soulignons bien le terme unit� lexicale pour �viter toute �quivoque, que de pouvoir poss�der plusieurs sens ou non ? Est-il justifi� d'attribuer � plateau, par exemple, entre autres, le sens de plateau-'vaisselle ' et le sens de plateau-'g�ographique'? Dit encore autrement, la pratique des lexicographes qui accordent � une unit� lexicale plusieurs sens est-elle fond�e ou non ? Ces sens sont-il vraiment accroch�s � l'unit� lexicale ou n'ont-ils qu'une existence discursive, ne sont-ils qu'un produit de la construction du message ?

Deux mani�res de nier la polys�mie

Une r�ponse possible est de refuser d'attribuer � toute unit� lexicale du sens pr��tabli (voir Kleiber, 1999). Le probl�me de la pluralit� de sens se trouve alors r�gl�, puisque l'exclusion de toute monos�mie entra�ne en m�me temps celle de toute pluralit� de sens. Nous n'envisagerons pas ici une telle position, parce qu'elle oblige � prendre position sur le statut et la nature du sens en g�n�ral (Larsson, 1997 et Kleiber, 1999).

Si l'on met de c�t� une telle position extr�me, mais tout � fait d�fendable, la polys�mie en tant qu'association de plusieurs sens � une m�me forme lexicale se trouve ni�e de deux mani�res apparemment paradoxales :

-a- D'une part, les vocables donn�s comme polys�miques se voient en quelque sorte � monos�mis�s � par la mise en avant d'un invariant sup�rieur, de quelque nature qu'il soit, qui unifie les diff�rentes interpr�tations. L'id�e, implicite ou explicite, est que ce sens subsumant, explicatif de la diversit� interpr�tative, ne correspond pas aux interpr�tations observables en discours et que l'on n'y acc�de qu'en rel�guant les sens � imm�diats � (surtout les valeurs d�nominatives et r�f�rentielles) � un �tage inf�rieur, qui n'est plus celui de la langue. Le locuteur lambda n'a �videmment pas acc�s � ces sens abstraits unificateurs (re)construits gr�ce � l'observation patiente et sagace du linguiste et qui ont l'avantage de s'ins�rer dans une conception plus g�n�rale de la langue vue comme le passage de formes, de sch�mes, de structures abstraites � une incarnation discursive faisant �merger les valeurs, les cat�gories faussement trait�es comme sens premiers par la tradition lexicale et lexicographique. On �tend ainsi � toute unit� lexicale des concepts comme ceux d'actualisation, de sous-d�termination ou de sous-sp�cification g�n�ralement appliqu�s au domaine des unit�s grammaticales, o�, comme de nombreuses �tudes l'ont montr�, la recherche d'un invariant sous-d�termin� et donc le refus d'un �ventail trop grand de sens morcel�s et non justifi�s est tout � fait indiqu�e. De fa�on plus g�n�rale, empressons-nous de le dire pour �viter toute �quivoque sur notre position, la qu�te d'un amont s�mantique pour rendre compte de la diversit� des � emplois � d'une unit� lexicale est une op�ration l�gitime, qui permet, s'il y a effectivement un tel invariant, de d�busquer les vocables faussement labellis�s polys�miques. Ce qui nous semble, par contre, beaucoup moins l�gitime, c'est de g�n�raliser la chose et de postuler qu'il en va ainsi de toute unit� lexicale, la polys�mie alors n'existant plus du tout.

-b- D'autre part, de fa�on tout � fait inverse aux tentatives de monos�misation, on fait prolif�rer les sens ou variations de sens. Autrement dit, on proc�de � la multiplication des cas de polys�mie. Soit en postulant qu'il s'agit d'une variation qui n'est pas li�e � un lex�me particulier, mais qui concerne une s�rie beaucoup plus grande d'unit�s, parce qu'elle d�pend d'une r�gle ou fonction g�n�rale (cf. 'animal' -> 'viande de cet animal' pour j'ai mang� du veau), que l'on appellera polys�mie r�guli�re (Apresjan, 1974) ou syst�matique (Nunberg, 1995, Nunberg et Zaenen, 1997 et Apresjan, 2000)) ou encore polys�mie logique (Pustejovsky, 1995) et dont la g�n�ralit� implique l'abandon d'un traitement au niveau de l'unit� lexicale et, partant, l'abandon de la polys�mie comme pluralit� s�mantique associ�e � une unit� lexicale. Soit surtout en multipliant les variations interpr�tatives contextuelles pour montrer qu'il ne peut s'agir d'un ph�nom�ne du niveau de l'unit� lexicale, mais d'un ph�nom�ne discursif, li� au contexte, de lectures de circonstance et non de sens du lex�me. C'est ainsi que Kayser (1987) assigne � livre l'interpr�tation 'objet' (manuscrit, disquette) dans l'�nonc� Jean �crit un livre, celle d'id�es contenues dans ce livre lorsqu'il se combine a influencer quelqu'un (cf. Ce livre a fortement influenc� les R�volutionnaires de 1789), celle de la commercialisation dans Ce livre a �t� un fiasco pour l'�diteur, etc. Deux r�sultats d�coulent d'une telle multiplication : l'impossibilit� d'�num�rer toutes les interpr�tations possibles, parce qu'il n'est pas toujours facile de s�parer ou de distinguer les diff�rentes interpr�tations et le renoncement � compter ces diff�rentes interpr�tations comme des sens du mot, puisqu'ils sont construits par le contexte et donc non autonomes. � Il est artificiel, comme l'�crit Cadiot (1992, 36) de leur allouer une existence ind�pendante de leur �mergence �.

Les positions -a- et -b- ne sont qu'apparemment paradoxales : il n'y a aucune contradiction, d'un c�t�, � faire dispara�tre la pluralit� de sens sous un sens amont ou invariant et, de l'autre, � proc�der � la multiplication des petits pains polys�miques, dans la mesure o� le point commun des deux positions est que la multiplicit� de sens n'est qu'un ph�nom�ne discursif et non un ph�nom�ne de l'unit� lexicale elle-m�me, puisque dans les deux cas, les sens relev�s ne sont pas associ�s � l'unit� lexicale elle-m�me, mais sont le r�sultat d'une construction discursive.

A la clef, le verdict s�mantique ne fait pas de doute : il n'y a plus lieu de parler de polys�mie. Il s'agit d'un jouet fabriqu� par les linguistes-s�manticiens, d'un artefact. Les unit�s lexicales n'ont pas plusieurs sens pr��tablis, qui leur appartiendraient en propre. Les variations interpr�tatives pr�sent�es ne sont que le produit de constructions discursives, o� interviennent diff�rents ingr�dients, allant jusqu'� la distinction des genres, des textes, etc.

Une double condition

Il serait possible d'examiner et d'�valuer les propositions faites par ceux qui promeuvent une telle approche de toute variation interpr�tative. Nous ne nous engagerons pas sur cette voie ici. Il nous semble plus important de nous limiter � la question mise en avant ci-dessus : est-ce qu'il est licite ou non de postuler qu'une unit� lexicale (un mot pour aller vite), en tant que telle, peut avoir plusieurs sens ? Est-ce qu'on peut attribuer, de fa�on non artificielle, � une unit� lexicale comme, par exemple, notre plateau de ci-dessus plusieurs sens ? Si oui, cela suppose que ces lectures ont �merg� des emplois discursifs pour devenir des traits de sens stabilis�s et non plus seulement des produits discursifs. Bien �videmment, dire qu'il en va ainsi ne prouve rien. Il revient au linguiste de le d�montrer.

A cet effet, il faut qu'il d�montre deux choses. Il faut que notre partisan de la polys�mie prouve que les acceptions ou lectures des lex�mes auxquels il entend accorder le statut de polys�me (et uniquement, bien entendu, � ceux-l�) sont bien des sens disjoints, non r�ductibles, en ce qu'ils ne sont pas � coiffables � par un sens sup�rieur qui n'en ferait que de simples effets de sens ou de simples emplois issus de la combinaison de ce sens amont avec les diff�rents ingr�dients contextuels. L'affaire n'est pas mince, �tant donn� qu'il semble toujours possible de trouver un chapeau s�mantique assez g�n�reux pour accueillir toutes les diff�renciations interpr�tatives manifest�es par une unit� lexicale. Elle n'est toutefois pas impossible, comme on le verra ci-dessous.

Il faut ensuite prouver que ces sens diff�rents disjoints ou s�par�s non � coiffables � unitairement sont r�ellement des sens stables accroch�s � l'unit� lexicale et non simplement des variations s�mantiques dues au contexte ou � la construction discursive. Autrement dit, il faut montrer cette fois-ci, non plus qu'il n'y a pas de sens sup�rieur qui coiffe la diversit� interpr�tative manifest�e, mais que les diff�rentes interpr�tations postul�es pour un m�me lex�me sont v�ritablement des unit�s s�mantiques associ�es au lex�me m�me et non plus seulement le produit de configurations discursives. Autrement dit, il faut d'une mani�re ou d'une autre montrer que ces sens n'existent pas seulement discursivement, mais qu'ils ont une forme d'existence lexicale, parce qu'ils ont acquis en quelque sorte une forme de libert� vis-�-vis du contexte ou des constructions dans lesquelles ils se manifestent. C'est prouver en somme que la polys�mie est bien une relation lexicale, paradigmatique, ayant acquis sa pertinence au niveau paradigmatique du lexique, parce que les sens en question ont acquis une saillance qui les fait survivre au contexte qui les a fait na�tre . Il s'agira donc de faire le tri entre les lectures qui restent d�pendantes des � circonstances � et celles qui ont gagn� leur autonomie, bref, entre celles qui n'arrivent pas � se d�tacher par rapport � la situation discursive et celles qui montrent une robustesse qui les fait survivre au contexte de leur �mergence.

En r�sum�, les candidats au statut de sens polys�miques, c'est-�-dire de sens associ� � une unit� lexicale, doivent pr�senter deux propri�t�s : ils doivent �tre non unifiables ou irr�ductibles � un sens ou lecture g�n�rale sup�rieure et ils doivent en m�me temps �tre suffisamment robustes ou forts pour acqu�rir un statut d'autonomie, qui les d�tache des circonstances discursives et les s�pare des lectures � fragiles � contextuelles, et qui leur permet d'�merger et d'�marger en tant que propri�t� s�mantique stable des unit�s lexicales. Comment reconna�tre qu'ils poss�dent ces deux propri�t�s ? C'est ce que nous essaierons de montrer dans notre deuxi�me partie.

La polys�mie existe, on peut la rencontrer
De nouveau quelques pr�cisions pr�liminaires

L'hypoth�se qui sous-tend notre d�marche est que s'il y a v�ritablement des sens qui pr�sentent les deux propri�t�s n�cessaires pour que ces sens soient v�ritablement associ�s � une unit� lexicale et donc puissent �tre qualifi�s v�ritablement de sens polys�miques, ces deux propri�t�s, c'est-�-dire la non-unifiabilit� (ou diff�rence irr�ductible) et leur robustesse ou autonomie vis-�-vis du discours doivent se manifester de diff�rentes mani�res, et notamment au niveau de leurs relations syntagmatiques et paradigmatiques o� nous retrouverons des tests plus ou moins classiques dans la litt�rature sur la multiplicit� du sens et l'ambigu�t� C'est uniquement l'existence de telles manifestations qui fondent leur pertinence linguistique au niveau lexical et qui assurent � la polys�mie ainsi d�montr�e un statut qui ne peut en rester au stade d'artefact de s�manticien.

On soulignera encore que la possession d'une de ces deux propri�t�s n'est bien entendu pas suffisante : chaque condition est n�cessaire, mais seule elle ne suffit pas, comme nous le verrons. Il faut la conjonction des deux pour conclure � la polys�mie.

Troisi�me pr�cision : il est clair que l'on ne saurait parler de non-unifiabilit� que si et seulement s'il y a eu reconnaissance d'une diff�renciation pr�alable. Comme nous l'avons montr� longuement dans Kleiber (2005), il n'y a g�n�ralement pas de discussion sur la multiplicit� ou non de sens d'une forme s'il n'y a pas au pr�alable l'intuition que cette forme peut pr�senter des interpr�tations ou des usages diff�rents. Comme cette variation interpr�tative s'appr�hende, qu'on le veuille ou non, avant tout en termes de � choses d�not�es �, c'est le sentiment qu'il ne s'agit plus ou pas de la m�me chose qui est � l'origine de la probl�matique du sens multiple. Nous avons appel� cette condition de d�part (n�cessaire, mais bien entendu non suffisante) le crit�re r�f�rentiel (Kleiber, 2005). Nous avons montr�, entre autres, que, plus l'autonomie du type d'entit� �tait grande (cf. par exemple les entit�s exprim�es par les substantifs non pr�dicatifs) et plus il �tait facile de s'appuyer sur la notion de type de r�f�rents diff�rents ou de cat�gorie diff�rente (ou encore de choses diff�rentes) pour engager une reconnaissance polys�mique, alors que, inversement, plus l'entit� en question �tait d�pendante et plus d�licat �tait le d�bat polys�mique.

Premi�re propri�t� : non-unifiabilit� ou diff�renciation irr�ductible
Diff�rents niveaux

La propri�t� de non-unifiabilit�, c'est-�-dire l'impossibilit� d'unifier diff�rentes lectures d'une unit� lexicale, se manifeste � plusieurs niveaux et se d�cline sous plusieurs formes, dont certaines sont, bien entendu, plus pertinentes que d'autres.

-1- non-unifiabilit� cat�gorielle : il est difficile, voire impossible, lorsqu'il s'agit de lectures engageant des cat�gories, de les r�duire � une seule cat�gorie subsumatrice (Kleiber, 2002 et 2004). C'est ainsi qu'il est difficile de concevoir une seule cat�gorie correspondant aux deux lectures de souris (souris-'animal' et souris d'ordinateur). Corollairement, il est �galement difficile de trouver un prototype qui correspondrait aux deux lectures, chaque lecture, mais non leur union, donnant lieu � un prototype. La variation interpr�tative de type vague ou sens sous-d�termin� (ou encore sens g�n�ral), par contre, se r�v�le de ce point de vue parfaitement unifiable. M�me si enfant peut donner lieu aux lectures diff�rentes et incompatibles 'gar�on' et 'fille', il est possible de faire correspondre une cat�gorie (avec son prototype) qui subsume les cat�gories 'gar�on' et'fille', � savoir la cat�gorie 'enfant'.

-2- non-unifiabilit� v�riconditionnelle : l'attribution d'une valeur de v�rit� s'�tablit au niveau de chaque lecture particuli�re et non au niveau d'une interpr�tation rassemblant les diff�rentes lectures. La diff�rence avec les situations de sens sous-d�termin� appara�t ici avec la n�gation. La proposition Paul n'a pas d'enfant est fausse si l'une des deux lectures (Paul a un gar�on / Paul a une fille), incompatibles entre elles, est vraie, alors que Paul n'a pas de souris n'est pas rendue fausse si l'une des deux lectures (souris-'animal' et souris d'ordinateur), incompatibles entre elles, elles aussi, est vraie, parce que la valeur de v�rit� se d�cide au niveau de chaque lecture particuli�re et n'est pas d�cidable plus haut. Donc m�me si Paul a une souris d'ordinateur, Paul n'a pas de souris reste vraie s'il s'agit de souris-'animal' et si Paul ne poss�de effectivement pas de souris-'animal'. Il s'ensuit au niveau discursif, une propri�t� d'autonomie que Cruse (2000 et 2003) appelle la possibilit� de n�gation ind�pendante. Il est en effet possible de nier de fa�on ind�pendante une des lectures (Cruse, 2000 et 2003) dans le cas de la pluralit� de sens du type souris, mais non dans le cas des variations interpr�tatives relevant du vague. A la question As-tu un enfant ?, on ne peut r�pondre non, si l'on a un gar�on ou une fille, alors qu'� la question As-tu une souris ?, il est possible de dire non alors qu'on poss�de une souris-'animal', si la question porte sur une souris d'ordinateur (et inversement).

-3- non unifiabilit� de lectures : lorsque deux lectures sont en comp�tition dans un m�me �nonc�, situation d'ambigu�t� classique, il n'est pas possible cognitivement d'unifier les deux lectures, comme l'illustrent sur le plan de la perception visuelle les fameuses images ambigu�s de la Gestaltth�orie : ou c'est l'une ou c'est l'autre, mais il n'est pas possible de saisir les deux simultan�ment. Cette non-unifiabilit� psychologique permet de montrer que le classique crit�re d'ambigu�t�, appel� crit�re d'interpr�tation multiple (Mel'Cuk, Clas et Polgu�re, 1995, 61), n'est pas suffisant. Le crit�re d'ambigu�t� stipule en effet que si une phrase a deux interpr�tations diff�rentes dues uniquement � une unit� lexicale L, alors L aura deux sens. Or, les unit�s lexicales de sens vague ou sous-d�termin� peuvent r�pondre � ce crit�re : Paul a un enfant donne lieu � la variation 'gar�on' ou 'fille' et ces deux interpr�tations sont bien dues � enfant. On ne parlera toutefois pas d'ambigu�t�, parce que les deux lectures sont parfaitement unifiables attentionnellement : il n'y a pas de comp�tition psychologique o� l'une doit l'emporter sur l'autre, comme dans le cas de Paul a une souris. Cela appara�t nettement si on oppose Paul voudrait un enfant � Paul voudrait une souris.

-4- non-unifiabilit� s�mantique : il n'est pas possible de trouver un sens g�n�ral, plus abstrait, rassemblant et organisant les diff�rentes lectures. C'est un point n�vralgique, puisque, comme nous l'avons vu, une des deux mani�res de nier la polys�mie, consiste pr�cis�ment � toujours trouver un sens abstrait explicateur. Ce point est d'autant plus n�vralgique qu'il est toujours possible de trouver un tel sens � coiffant � en prenant les traits communs � toutes les lectures ou emplois relev�s. Il y a toutefois un probl�me, celui de la pertinence d'un invariant construit de la sorte. Il est bien souvent trop abstrait et par l�-m�me incontr�lable : on oublie g�n�ralement de montrer comment se fait la � descente � vers les interpr�tations attest�es. Mais le danger le plus grand est celui d'une trop grande puissance : on trouve, certes, des d�nominateurs communs � toutes les lectures relev�es, mais ce sens construit � partir des traits communs, s'il se retrouve effectivement toujours dans les lectures particuli�res, court le risque de pr�senter un pouvoir pr�dictif trop fort : il lui arrive en effet de pr�voir des sens ou lectures (ou emplois) qui n'existent pas, au point qu'il appara�t dans ce cas comme �tant un artefact du linguiste qui l'a construit. Martin (2005, 170) cite ainsi le cas de quartier et montre que, quel que soit le sens g�n�ral sup�rieur propos� (comme par exemple 'partie d'un tout'), m�me si ce sens rend compte des diff�rents sens ou emplois recens�s (quartier de viande, quartier de ville, quartier des femmes, etc.), il ne pourra pas expliquer pourquoi on n'a pas quartier d'un livre, pour le chapitre d'un livre, ou quartier d'une symphonie pour le mouvement d'une symphonie. � Rien, conclut-il (2005, 170), ne permet de le pr�voir. La seule solution est d'inscrire les possibles dans le dictionnaire �.

Bref, il existe incontestablement des lectures diff�rentes d'une m�me forme qui ne sont s�mantiquement pas unifiables, de fa�on non artificielle. Ce ne sont pas, automatiquement, on le verra, des sens polys�miques, mais les sens qui pr�tendent repr�senter un fait de polys�mie doivent poss�der une telle propri�t�.

Tests syntagmatiques et paradigmatiques
Syntagmatiques

Il y a des correspondants formels syntagmatiques et paradigmatiques � la non-unifiabilit� que nous venons de mettre en avant. Au niveau syntagmatique, on observe en effet que les structures et constructions qui supposent d'une mani�re ou d'une autre une forme d'unit� sont plus ou moins r�calcitrantes au sens multiple non unifiable. On retrouve l� certains tests bien souvent appel�s � la rescousse dans la litt�rature sur la polys�mie et l'ambigu�t�. Tous n'ont pas la m�me pertinence, mais tous tirent dans la m�me direction.

En premier lieu, on mentionnera un crit�re gu�re utilis�, car pas facilement manipulable et d'application limit�e aux SN, mais pourtant int�ressant : la difficult� d'avoir pour les sens non unifiables un SN avec une interpr�tation g�n�rique � coiffante �, c'est-�-dire recouvrant les diff�rentes lectures. Face aux situations de sens g�n�ral, o� la chose est tout � fait possible, comme le montre un �nonc� du type Les enfants sont toujours ingrats, qui recouvre aussi bien la sp�cification 'gar�on' que 'fille', il n'est gu�re possible d'envisager un �nonc� g�n�rique similaire avec le SN les souris � couvrant � de la m�me mani�re aussi bien les souris-'animaux' que les souris d'ordinateur. Un tel regroupement n'est possible qu'au niveau m�talinguistique, celui qui repose sur la pluralit� de lectures et il faut que la phrase soit � la forme n�gative et comporte le quantificateur de totalit�, ceci pour rappeler pr�cis�ment que l'unification n'est pas possible, parce qu'il y a plusieurs types de choses appel�es X. C'est ainsi que l'on peut avoir en regroupement : toutes les souris ne sont pas des animaux, mais non pour une union du m�me type : Les souris ne sont pas des animaux, ni Toutes les souris sont des animaux.

En deuxi�me lieu, on dispose du crit�re de cooccurrence compatible (Mel'Cuk, Clas et Polgu�re, 1995), appel� aussi crit�re de Green-Apresjan par par Mel'Cuk, Clas et Polgu�re ou crit�re des sens antagonistes par Cruse (1986). (Green 1969 et Apresjan, 1992). Ce crit�re �tablit qu'il y a sens multiple si et seulement si la cooccurrence discursive des diff�rentes lectures ou interpr�tations se r�v�le impossible, en somme si les diff�rents sens ne sont pas compatibles, unifiables et se r�v�lent donc antagonistes, disjoints. Il s'agit d'un indicateur assez fiable qui projette sur le plan syntagmatique l'incompatibilit� paradigmatique des sens concern�s. L'id�e qu'il traduit est que, si deux lectures d'une m�me unit� lexicale sont vraiment deux lectures autonomes, non unifiables, elles ne sont pas non plus compatibles en les mettant ensemble au niveau syntagmatique. Ce crit�re rev�t plusieurs formes. La coordination de constituants qui activent les diff�rentes interpr�tations est souvent utilis�e. C'est ainsi que si l'on prend le cas de veau-'animal' et veau-'viande de cet animal', la coordination de deux adjectifs qui activent les deux lectures aboutit � un zeugme, qui r�v�le bien leur incompatibilit� :

? Ce veau est rapide et tendre (dans le sens o� tendre porte sur la viande)

La contrainte d'identit� (Cruse, 1986) est une autre forme de ce test syntagmatique. Elle exige qu'en cas d'anaphore du type aussi, tout comme, ainsi fait X... ? l'on ne puisse avoir une interpr�tation crois�e, l'ant�c�dent et l'anaphore ne pouvant �tre de lecture diff�rente. L'�nonc� Pierre aime ce plateau, Paul aussi ne conna�t ainsi que des interpr�tations d'identit�. S'il s'agit du plateau-'vaisselle' pour Pierre, il en va �galement ainsi pour Paul et si c'est le plateau g�ographique, il en va encore ainsi pour Paul. Ce qui se trouve exclu, c'est l'interpr�tation crois�e o�, par exemple, pour Pierre il s'agirait du plateau-'vaisselle' et pour Paul du plateau g�ographique. Si on applique ce test au sens sous-d�termin�, on constate que les interpr�tations crois�es sont cette fois-ci permises. L'�nonc� Marie attend un enfant, Berthe aussi donne lieu � quatre lectures, deux d'identit� (une o� Marie et Berthe attendent toutes les deux une fille et une o� ils attendent un gar�on), mais aussi deux de non identit� (une o� Marie attend un gar�on et Berthe une fille et l'autre o� c'est l'inverse). Trouvent leur place �galement ici les relatives qui en cas de lectures non r�ductibles ne permettent pas une divergence r�f�rentielle entre l'ant�c�dent et le pronom relatif (cf. J'aime faire des promenades sur le plateau qu'a achet� Pierre pour compl�ter la vaisselle). Il en va de m�me pour les anaphores r�alis�es par les pronoms de 3e personne (Ce plateau est tr�s fr�quent�. Il est en fa�ence), qui permettent de rectifier certaines analyses op�r�es � propos d'un �nonc� tel que Georges Sand est sur l'�tag�re de gauche : contrairement � ce que l'on pourrait attendre, un tel �nonc� ne se pr�te qu'� une anaphore sur l'�crivain et non sur les oeuvres (Georges Sand est sur l'�tag�re de gauche. Tu verras, elle �crit divinement / * Georges Sand est sur l'�tag�re de gauche. Elle / ils est / sont reli�(s) en cuir) (Kleiber, 1994 et 1999).

Troisi�mement, le crit�re de distribution diff�rente (ou de cooccurrence diff�rentielle selon Mel'Cuk, Clas et Polgu�re, 1995) est une autre manifestation de la non-unifiabilit�. L'id�e sous-jacente est que la dissociation des sens se traduit aussi par une dissociation distributionnelle. Ou, autrement dit, la non-unifiabilit� des lectures appara�t dans une non unification distributionnelle correspondante : si on peut d�gager deux ensembles disjoints de cooccurrents (morphologiques, syntaxiques ou lexicaux) tels que l'un correspond � S1 et l'autre � S2, alors on a sens multiple (Mel'Cuk, Clas et Polgu�re, 1995). Citons ici le cas classique du verbe regarder souvent utilis� pour prouver l'efficacit� du crit�re de diff�renciation distributionnelle dans la s�paration du sens locatif ('�tre tourn� vers') du sens standard perceptuel actif. Les exemples parlent d'eux-m�mes :

Paul regarde la montagne Paul a regard� la montagne L'�glise regarde la montagne *L'�glise a regard� la montagne Ce match a �t� regard� par toute la population * La montagne a �t� regard�e par l'�glise Paul a regard� intentionnellement la montagne *L'�glise regarde intentionnellement la montagne

Deux remarques sont n�cessaires. La premi�re concerne la diversit� des faits syntagmatiques � prendre en compte : constructions, contraintes s�lectionnelles, collocations, etc. : tous n'ont pas la m�me importance et il conviendrait d'�tablir une hi�rarchie pour voir lesquels l'emportent sur d'autres. Deuxi�mement, ce crit�re de distribution diff�rentielle est un des crit�res auxquels on a recours le plus fr�quemment pour prouver les faits de sens multiples, mais il faut souligner que, plut�t qu'un crit�re de reconnaissance, c'est plus une manifestation de la pertinence d'une pluralit� de sens d�j� diagnostiqu�e autrement, qu'elle peut donc venir appuyer ou confirmer, mais non reconna�tre elle-m�me. Nous voulons dire par l� que l'utilisation de ce crit�re � l'aveugle, c'est-�-dire sans d�limitations s�mantiques d�j� effectu�es conduit bien vite � des impasses. La raison en est bien simple. On a pour la majorit� des sens ou lectures des diff�rences de cooccurrence (dans le sens large indiqu� ci-dessus). Si l'on s'en tenait donc uniquement � de telles diff�rences sans contr�le s�mantique et si l'on consid�rait ces diff�rences comme d�cisives pour la d�limitation du sens multiple, il faudrait conclure � autant de sens diff�rents que de ph�nom�nes distributionnels diff�rents. Notre mise au point montre ainsi que ce crit�re est le plus efficace l� o� les diff�rences interpr�tatives sont les plus nettes et s'av�re beaucoup plus fragile ou d�licat � manipuler l� o� les h�sitations sont permises (y a-t-il diff�rence d'interpr�tation ou non ?). C'est, dans ce dernier cas, que les analyses peuvent diverger, parce qu'elles se servent de tel ou tel fait de cooccurrence diff�rentielle pour faire basculer le sens vers le multiple ou non.

Paradigmatiques

La non-unifiabilit� se laisse aussi appr�hender au niveau paradigmatique : l'hypoth�se est qu'il n'y a pas de relations au niveau paradigmatique qui conduiraient ou induiraient une union des deux unit�s de sens (ou plus) test�es. Les sens disjoints test�s pr�senteraient ainsi des ensembles de relations lexicales paradigmatiques disjointes, en autonomie relationnelle (Croft et Cruse, 2004, 113).

En premier, lieu, l'absence d'hyperonyme pour couvrir lexicalement les deux lectures est un �cho direct de la non-unifiabilit� s�mantique. S'il y a un hyperonyme disponible pour � coiffer � les diff�rentes lectures, on peut en conclure qu'il n'y a pas sens multiple. Le sens g�n�ral ou vague se trouve ainsi d�finitoirement �limin�. L'inverse n'est bien entendu pas vrai : l'absence d'hyperonyme ne signifie pas automatiquement qu'il y a sens multiple.

En deuxi�me lieu, la synonymie (intra- et interlinguistique) s'av�re �tre fort utile : le test consiste � montrer que deux lectures non unifiables ont �galement deux ensembles de synonymes disjoints, non unifiables. On se contentera de citer sans le commenter l'exemple de l'adjectif juste emprunt� � Gross (1998, 111) :

juste / N0 : hum / Sy : droit, int�gre, honn�te juste /N0 : hum /N1 : avec hum / Sy : �quitable, impartial juste / N0 : action <r�compense, punition> / Sy : l�gitime, justifi�, fond� juste / N0 : action <calcul, d�duction> / Sy : correct, exact juste / N0 : inc (= inanim� concret) <v�tement> / Sy :�troit, �triqu� juste / N0 :inc <instr de mesure> /Sy : exact, pr�cis juste / N0 : inc <instr de musique> / Sy : accord�

On ajoutera que, tout comme les collocations (cf. supra), la synonymie est aujourd'hui au premier plan dans les affaires polys�miques. Certains vont jusqu'� en faire l'instrument principal d'une approche de la polys�mie : � On peut repr�senter la polys�mie (ou dans la terminologie de la s�mantique lexicale europ�enne, le champ s�masiologique) d'une unit� lexicale sous la forme d'un espace s�mantique pr�sentant autant de dimensions que de synonymes qui lui sont associ�s � (Fran�ois, Victorri et Manguin, 2005, 175).

La synonymie appelle tout naturellement l'antonymie : la dissociation de deux lectures peut se manifester �galement dans l'existence d'antonymes diff�rents, non r�ductibles � un antonyme sup�rieur : si l'on a une valise l�g�re comme un caf� l�ger, l'on n'aura pas face � une valise lourde, un *caf� lourd.

En quatri�me lieu, des d�riv�s diff�rents selon le sens peuvent aussi venir appuyer une dissociation interpr�tative. (cf. le crit�re de d�rivation diff�rentielle de Mel'Cuk, Clas et Polgu�re, 1995, 68). Ainsi les trois lectures d'�lever dans a), b) et c) donnent lieu � des d�riv�s diff�rents (exemple de Mel'Cuk, Clas et Pogu�re, 1995, 68) :

a) Toute sa vie, Jeanne a �lev� des enfants (par exemple, elle est une jardini�re d'enfants) b) Toute sa vie, Jeanne a �lev� des cochons (par exemple, elle est une fermi�re) c) Toute sa vie, Jeanne a �lev� du vin

Pour b), il y a le nom d'action d�riv� �levage (Jeanne s'occupe d'�levage de cochons), le nom d'agent �leveur / �leveuse (Jeanne est �leveuse de cochons). Pour a) ces d�rivations sont impossibles : * �levage d'enfants, *�leveur d'enfants, mais on a des d�riv�s lexicaux (des suppl�tifs) : �ducation, formation, instituteur, jardini�re d'enfants. Pour c), on n'a pas *�levage de vin, mais �leveur de vin.

Il y aurait d'autres pistes � creuser, celle des champs s�mantiques notamment, mais pour nous l'essentiel est d'avoir montr� la diversit� des faits paradigmatiques qui peuvent venir conforter l'existence de sens non unifiables. Il faut se rappeler que ces crit�res ne sont pas d�cisifs - Cruse (1986) parle de tests indirects - car leur caract�re paradigmatique suppose leur d�tachement pr�alable et leur stabilisation par rapport aux configurations syntagmatiques qui les actualisent.

Deuxi�me propri�t� : � la polys�mie prise au mot �
Pourquoi les tests de non-unifiabilit� ne suffisent pas

G�n�ralement, on fait comme si les crit�res de non-unifiabilit� suffisaient pour garantir le caract�re polys�mique des sens diff�rents examin�s. Nous avons toutefois bien soulign� que la propri�t� de non-unifiabilit� n'�tait � elle seule pas d�cisive, parce qu'elle ne garantissait pas que les sens d�clar�s antagonistes ou irr�ductibles �taient v�ritablement des sens associ�s � l'unit� lexicale. Mis � part les tests paradigmatiques, parce qu'ils supposent une stabilisation lexicale hors contexte, beaucoup de tests que nous avons vus s'appliquent � des ph�nom�nes de variation interpr�tative qui ne rel�vent pas de la polys�mie parce qu'ils ne poss�dent pas la deuxi�me propri�t� postul�e, � savoir la robustesse ou autonomie par rapport au discours. Dans ses diff�rents travaux (voir bibliographie), Cruse insiste sur ce point en montrant qu'une variation de sens comme celle de la c�l�bre � omelette � ('plat' et 'client qui a command� ce plat') :

L'omelette est parti(e) sans payer

r�pondait aux crit�res des sens antagonistes, mais ne pouvait pr�tendre au statut de polys�mie, parce qu'elle restait une lecture d � circonstance �. La v�rification de son caract�re non unifiable est facile � faire : pas de cat�gorie ni de sens subsumant possible, pas d'unifiabilit� des lectures et peu de tentatives m�me chez les monos�mistes pour trouver un invariant aux deux lectures. Les tests syntagmatiques confirment cette analyse : pas d'interpr�tation g�n�rique � coiffante � possible, cooccurrence discursive des deux lectures impossible (*L'omelette est trop sal�e et est assise � la troisi�me table), contrainte d'identit� n�cessaire (pas de lecture crois�e possible pour Pierre a servi l'omelette, Paul aussi, pas de divergence dans une phrase avec relative * L'omelette, qui �tait trop sal�e, est parti(e) sans payer), etc. Les tests paradigmatiques, comme d�j� annonc�, ne s'y appliquent gu�re, pr�cis�ment parce qu'une des lectures (celle du 'client') n'est pas reconnue comme �tant un sens stabilis� � rattacher en propre � l'unit� lexicale omelette.

Autonomie et pertinence lexicale

Deux conditions doivent �tre remplies pour que l'on puisse parler de lectures propres � l'unit� lexicale, de lectures qui n'�mergent pas seulement au niveau syntagmatique, mais qui ont �galement acquis un statut paradigmatique. Premi�rement, elles doivent bien avoir pour source l'unit� lexicale en question et non pas une autre source. En second lieu, elles doivent �tre assez robustes pour avoir une existence hors discours, au niveau de l'unit� lexicale.

La premi�re condition permet d'�liminer deux types de situations de sens multiple : les lectures accroch�es aux locutions fig�es (noms compos�s compris) et celles qui sont le produit de m�canismes polys�miques plus g�n�raux.

Dans le premier cas, �tant donn� la non compositionnalit� s�mantique de l'expression fig�e, on ne peut reporter sur un constituant une partie ou le sens global de l'ensemble de l'expression. On ne saurait, pour reprendre un exemple classique de la litt�rature, parler de la multiplicit� de sens d'arbre en y faisant entrer la lecture correspondant � arbre � came, parce qu'arbre dans arbre � came n'est pas libre et donc l'interpr�tation qu'on associe � arbre � came ne saurait �tre r�percut�e sur celle d'arbre. Il s'agit d'une question cruciale, puisqu'une bonne partie des d�tracteurs de la notion de polys�mie, non seulement int�grent ce type d'expressions fig�es, mais les consid�rent comme meilleurs pour l'exploration du sens de l'unit� lexicale que les emplois � libres �.

Le second cas a �t� d�j� �t� abord� ci-dessus. Les polys�mies appel�es r�guli�res ou syst�matiques, quel que soit leur degr� de g�n�ralit�, ont pour caract�ristique de ne pas �tre d�pendantes de l'unit� lexicale pr�cise qui les actualise, mais de grandes r�gles (cognitives ou autres). Il s'ensuit que, comme l'ont soulign� tous ceux qui ont mis en avant ce type de transferts s�mantiques, on ne saurait porter les lectures obtenues par ces r�gles au cr�dit des unit�s lexicales qui les manifestent. Reprenons ici le cas de l'omelette qui est partie sans payer : le transfert m�tonymique s'applique � tout plat command� et ne concerne donc pas directement le lex�me omelette et, partant, interdit d'associer � omelette directement le sens de 'client qui a command� une omelette'. En abordant la deuxi�me condition on verra qu'il y a une deuxi�me raison � ne pas effectuer un tel choix.

La deuxi�me condition impose le d�tachement vis-�-vis du discours, l'autonomie vis-�-vis du contexte ou de la situation, propri�t� qui permet de parler de la robustesse ou de la force des lectures puisque celles-ci subsistent dans ce cas aux situations discursives qui les ont fait �merger. Qu'on ne se m�prenne pas : cela ne veut pas dire que la compr�hension ne n�cessite pas une situation discursive pr�cise (et que donc la lev�e d'ambigu�t� possible ne s'op�re pas par le contexte). Ce qu'il faut entendre par l�, c'est uniquement que les lectures ont acquis assez d'ind�pendance pour appara�tre comme une propri�t� du lex�me et non plus seulement comme la cons�quence d'une construction discursive. Autrement dit, les lectures qui pr�tendent au statut de polys�mie ne peuvent pas �tre seulement des lectures de circonstance, qui ne survivent pas � la situation qui les a produites, mais doivent avoir gagn� leur pertinence au niveau m�me de l'unit� lexicale.

Se trouvent exclus en cons�quence tous les emplois � figur�s � circonstanciels (cf. m�taphores vives et autres tropes cr�atifs), qui ne sont pas stabilis�s au niveau de l'unit� lexicale. La chose n'a rien d'�tonnant, �tant donn� que ce type de d�calage s�mantique � rh�torique � n'est g�n�ralement pas retenu dans la probl�matique de la polys�mie.

Plus int�ressants par contre se r�v�lent les transferts de sens plus ou moins r�guliers d�j� entrevus ci-dessus, lors de la premi�re condition, parce que ce sont des candidats s�rieux au statut de polys�mie et qu'ils permettent de mieux voir en quoi consiste la question de l'autonomie ou non-autonomie circonstancielle, de la robustesse ou non des lectures en jeu. Soit une nouvelle fois donc notre exemple de l'omelette partie sans payer. Qu'il s'agit d'une lecture non robuste, non autonome, transpara�t � trois niveaux : situationnel, syntagmatique et paradigmatique.

Au premier niveau, on note une limitation situationnelle tr�s forte, signal�e par Cruse (2003). Il semble difficile de pouvoir utiliser, sans faire sourire (on retombe alors sur le cas des emplois figur�s cr�atifs), le SN l'omelette pour le client en dehors de la situation que repr�sente le restaurant avec ses clients et ses serveurs (ou une autre situation impliquant des plats). De fa�on plus pr�cise encore, il faut que celui qui utilise l'expression l'omelette ainsi soit dans une situation qui l�gitime une telle utilisation. On comprend pourquoi le serveur puisse s'en ...servir (!) : le client existe pour lui avant tout par l'interm�diaire du plat command�. Il est beaucoup plus difficile, mais non impossible, qu'une autre personne pr�sente dans le restaurant d�signe ainsi l'omelette en question. On pourrait citer ici bien d'autres cas, comme celui de Je suis gar� pas loin d'ici (Kleiber, 1995 et 1999) qui ne peut se concevoir que dans la situation o� le locuteur est effectivement � automobiliste �. S'il est assis dans son salon en train de regarder la t�l�, il ne pourra dire : je suis gar� dans mon garage, m�me si sa voiture est effectivement gar�e dans son garage. De m�me on ne peut avoir Schumacher perd de l'huile que s'il est en train de rouler en voiture.

Au deuxi�me niveau, on observe que les pr�dicats qui accompagnent les expressions d�cal�es sont beaucoup plus restreints que l'aire pr�dicative d�limit�e par le sens du r�f�rent d�sign�. C'est ainsi que George Sand peut �tre sur l'�tag�re de gauche (Georges Sand est sur l'�tag�re de gauche), mais on ne saurait avoir, comme on pourrait l'attendre de la s�lection op�r�e par le sens 'les oeuvres ou livres de l'�crivain ainsi nomm�', Georges Sand est tomb� par terre (m�me dans la situation o� les livres de Georges Sand de l'�tag�re en question sont tomb�s par terre). On notera inversement - ce qui est r�v�lateur �galement - que ce sens d'omelette n'a quasiment pas de collocations sp�cifiques comme les lectures multiples � statut polys�mique.

Au troisi�me niveau, enfin, toutes ces lectures n'ont pas acc�s aux relations paradigmatiques, qui marquent pr�cis�ment par d�tachement syntagmatique l'accessibilit� au statut paradigmatique de sens lexical, c'est-�-dire son rattachement � l'unit� lexicale. Cruse (2003) a fort bien not� ce manque de robustesse � propos de l'exemple de l'omelette. M�me si les sens 'plat' et 'client qui a command� ce plat' sont non unifiables, comme nous l'avons vu, la lecture 'client qui a command� ce plat' n'acc�de pas au niveau des relations s�mantiques qui structurent le lexique. Il n'a pas acquis le statut d'hyponyme de 'client' et donc client n'est pas son hyperonyme (? Les omelettes et autres clients) et, contrairement aux autres exemples de sens multiple que nous avons mentionn�s ci-dessus il n'entre pas dans des r�seaux de synonymie, d'antonymie et ne donne pas lieu � des d�riv�s sp�cifiques.

Conclusion

Il existe donc bien, ce sera notre conclusion, des variations interpr�tatives qui ont des propri�t�s particuli�res, la non-unifiabilit� et une autonomie discursive, qui se traduisent, comme nous avons essay� de le montrer, par des manifestations syntagmatiques et paradigmatiques sp�cifiques. On ne saurait nier ces manifestations linguistiques : si pour telle situation de sens multiple une anaphore ne peut s'�tablir ou s'il n'est pas possible de coordonner des constituants qui activent les diff�rentes interpr�tations sans effet de zeugme ou si encore telle lecture conna�t des relations paradigmatiques que telle autre ne conna�t pas, c'est que ces propri�t�s sont des propri�t�s empiriques, qui prouvent in fine qu'il ne s'agit pas d'un artefact d� � une tradition logico-grammaticale qui a toujours bon dos ou � je ne sais quel autre commode �pouvantail th�orique que l'on agite avec une opacifiante gourmandise non dissimul�e. Et, partant, ces donn�es prouvent aussi que la mise en avant de variations interpr�tatives qui pr�sentent la conjonction des deux propri�t�s n'est pas non plus artificielle. Il ne s'agit, bien entendu, pas encore de polys�mie, puisque celle-ci n�cessite en plus une analyse interne des lectures qui mette au jour la ou les relations unissant ces lectures, point que nous n'avons pas abord� ici. Et on peut, si on le d�sire, refuser le terme de polys�mie et celui d'homonymie. Ce n'est apr�s tout qu'une affaire d'�tiquettes. Mais ce que l'on ne saurait refuser, c'est que certaines interpr�tations multiples ont des propri�t�s empiriques particuli�res qui font qu'elles sont linguistiquement pertinentes au niveau de l'unit� lexicale elle-m�me et non plus seulement du discours. C'est ce point, souvent ni� aujourd'hui, qui me semble essentiel. Pour le dire autrement, si en mati�re de polys�mie tous les sens ne sont pas permis, la polys�mie elle-m�me n'est pas un sens interdit.

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