Contributions de la linguistique interactionnelle ILF ILF r�cup�ration du fichier au format texte Nikola Tulechki cr�ation du header Mai Ho-Dac pretraitement et balisage du texte selon la TEI P5 Nikola Tulechki 10/09/2009 CLLE-ERSS
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exploitable et diffusable pour la communaut� scientifique

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Lorenza Mondada Contributions de la linguistique interactionnelle ILF http://www.linguistiquefrancaise.org/content/view/217/282/lang,fr/

ANNODIS

projet financ� par l'ANR (Agence Nationale pour la Recherche), CNRS, 2007-2010, dirig� par Maire-Paule P�ry-Woodley, universit� de Toulouse - UTM

objectif : cr�ation d'un corpus de fran�ais �crit annot� discursivement

encodage des textes selon la norme de la Text Encoding Initiative, TEIP5

http://www.tei-c.org/release/doc/tei-p5-doc

cmlf article scientifique linguistique Histoire, �pist�mologie, r�flexivit�
french
Contributions de la linguistique interactionnelle Lorenza Mondada Laboratoire ICAR, CNRS & Universit� de Lyon D�partement Sciences du Langage, Universit� Lyon2
Introduction

Ce texte a pour objectif d'expliciter un certain nombre d'enjeux qui se posent de mani�re g�n�rale en sciences du langage aujourd'hui et qui re�oivent une r�ponse sp�cifique de la part de la linguistique interactionnelle. Cela permet de situer la contribution d'une litt�rature r�cente et souvent encore peu connue en France et de poser les bases pour une discussion sur ses �volutions actuelles.

Une des exigences de plus en plus affirm�es au sein de la linguistique contemporaine concerne la n�cessit� d'articuler diff�rents paliers d'analyse, qui s'exprime de diverses mani�res selon les paradigmes th�oriques : articulations entre syntaxe et pragmatique, entre propri�t�s structurelles de la langue et ses usages en soci�t�, entre contraintes formelles et fonctionnelles. Plusieurs courants linguistiques ont jou� un r�le fondamental dans le d�veloppement de ces interfaces : on peut mentionner la linguistique fonctionnelle de Talmy Givon, les d�veloppements r�cents de la construction grammar, les diff�rentes formes d'�mergentisme, l'�tude de la grammaticalisation qui prend de plus en plus en compte les contraintes pragmatique et discursives, voire interactionnelles.

Cette premi�re exigence va de pair avec une seconde, consistant � reconna�tre l'importance de travailler sur des corpus de donn�es attest�es : cette exigence, critique aussi bien envers la d�marche introspective qu'envers les techniques d'�licitation de r�ponses contraintes sur le langage, r�pond � l'enjeu th�orique de d�velopper des usage-based grammars.

La linguistique interactionnelle est un paradigme r�cent, qui a �merg� comme tel durant les ann�es 90, tout en reposant sur les acquis de l'analyse conversationnelle, apparue dans les ann�es 60. Elle r�pond de mani�re sp�cifique � ces exigences, en d�veloppant un projet syst�matique d'�tude de la langue dans l'interaction, sur la base d'enregistrements d'interactions en situation naturelle. Tr�s pr�sente dans la linguistique scandinave, anglo-saxonne et allemande, elle l'est encore peu dans le paysage de la linguistique fran�aise, tout en commen�ant � s'y d�velopper, comme en t�moignent les articles pr�sents dans cette section. Dans ce qui suit nous allons rappeler quelques rep�res historiques (1.), pr�ciser la d�marche relative aux corpus (2.) et � leur analyse (3.), avant d'expliciter la mani�re dont s'imbriquent analyse de l'organisation de l'interaction et analyse des ressources linguistiques (4.), avant de conclure sur quelques enjeux majeurs qui ouvrent sur un chantier encore largement � d�fricher (5.).

Quelques rep�res historiques

Il est int�ressant de constater que les principes de l'interactionnisme �mergent chez des auteurs tr�s disparates au d�but du XXe si�cle - aussi divers que les pragmatistes am�ricains, tels que Mead, Dewey, ou James, et les auteurs sovi�tiques tels que Bakhine-Volosinov et Vygotsky. Tous reconnaissent de diff�rentes mani�res l'ancrage des dynamiques de l'esprit comme du langage dans la pratique et plus pr�cis�ment dans les pratiques interactionnelles.

Pour ne prendre qu'un exemple, Volosinov affirme d�s 1929 que :

Word is a two-sided act. It is determined equally by whose word it is and for whom it is meant. As word, it precisely the product of the reciprocal relationship between speaker and listener, addresser and addressee [...] A word is territory shared by both addresser and addressee, by the speaker and his interlocutor. (Volosinov, 1929, trad. anglaise, 1973 : 86).

Cette reconnaissance pr�coce du r�le de l'interaction dans la structuration du langage et de l'action r�ciproque des co-participants non seulement sur la compr�hension de ce qui est �chang� mais sur la production m�me (cf. Bronckart et Br�s, ici-m�me, pour une discussion de cet h�ritage) entre en r�sonance avec les contributions plus r�cents de la linguistique interactionnelle - notamment le travail pionnier de Goodwin, dans son analyse, d�s 1979, de l'�nonc� comme �tant co-produit interactionnellement par les interlocuteurs dans les d�tails les plus subtils de son �nonciation (voir Goodwin, 1981), permettant d'inscrire le principe interactionnel au sein d'unit�s traditionnellement trait�es comme relevant typiquement de l'activit� monologale du locuteur.

C'est dans les ann�es 60 que l'h�ritage de l'interactionnisme dans diff�rentes disciplines (sociologie, psychologie, linguistique) donne lieu � la formulation de mod�les d'analyse qui joueront un r�le fondamental pour le d�veloppement de la pragmatique, de l'analyse du discours et de l'analyse de l'interaction en linguistique, avec de fortes ramifications interdisciplinaires. Goffman y intervient comme un point de r�f�rence central, inspirant aussi bien l'analyse conversationnelle (Sacks, Schegloff, Jefferson, 1979, 1977, Schegloff & Sacks, 1973 ; Sacks, 1992 ; Schegloff, 2007 - cf. Lerner 2004 pour une anthologie d'�crits des fondateurs), sur le mod�le de l'Ecole de Birmingham (Sinclair & Coulthard, 1975), qui sera repris en France par l'Ecole de Gen�ve (Roulet, 1980, Roulet et alii 1985), sur la sociolinguistique interactionnelle (Gumperz, 1982), sur les th�ories de la politesse (Brown & Levinson, 1978) reprises en France par les travaux de Kerbrat-Orecchioni (1990 - 94).

Dans ce contexte, l'analyse conversationnelle (AC) appara�t dans les ann�es 60 comme une mani�re de d�velopper le programme ethnom�thodologique (fond� par Garfinkel, 1967) en ancrant l'�tude de l'organisation situ�e des pratiques sociales dans l'analyse fine d'enregistrements - audio � l'�poque - de pratiques interactionnelles naturelles. L'analyse conversationnelle est le premier courant qui a r�pondu de mani�re syst�matique � l'exigence de travailler sur des donn�es enregistr�es naturelles : l'int�r�t pour la parole conversationnelle est � maintes reprises signal� par Sacks (1984) comme ne relevant pas d'un int�r�t particulier pour le langage en soi mais comme �tant un byproduct de l'exigence de fonder la description des � m�thodes � par lesquelles les co-participants organisent, interpr�tent et produisent leurs contributions � l'interaction sur des enregistrements de situations de parole naturelles. Reste que cette exigence produira un corps important d'�tudes sur les caract�ristiques syst�matiques de la parole-en-interaction, centr�es sur la conversation d'abord - entendue comme l'usage prototypique du langage le moins contraint et donc offrant la plus grande diversit� de formats s�quentiels - sur des interactions institutionnelles et professionnelles ensuite, permettant d'observer la sp�cialisation des formats conversationnels dans divers contextes sociaux (Drew & Heritage, 1982).

Le but de l'AC, dans sa g�n�ralit�, est de rendre compte de la conversation comme un ph�nom�ne ordonnn�. Cet ordre toutefois n'est pas pr�existant � la conversation, ni n'ob�it � des principes qui lui seraient ext�rieurs et qui ne feraient qu'y �tre reproduits : cet ordre est produit in situ, par les participants, de mani�re endog�ne. L'objet de l'analyse est donc moins l'ordre lui-m�me que la mani�re dont il est accompli, gr�ce � des proc�d�s - des m�thodes - mis en oeuvre par les participants, qui sont, eux, reproductibles et g�n�ralisables. Ainsi que le r�sume Psathas, la t�che de l'analyste est par cons�quent de produire une description des principes d'ordre, tels que trait�s par les participants :

Conversation analysis studies the order/organization/orderliness of social action, particularly those social actions that are located in everyday interaction, in discursive practices, in the sayings/tellings/doings of members of society.

Its basic assumptions are :

Order is a produced orderliness. Order is produced by the parties in situ; that is, it is situated and occasioned. The parties orient to that order themselves; that is, this order is not an analyst's conception, not the result of the use of some preformed or preformulated theoretical conceptions concerning what action should/must/ought to be, or based on generalizing or summarizing statements about what action generally/frequently/often is. Order is repeatable and recurrent. The discovery, description, and analysis of that produced orderliness is the task of the analyst. Issues of how frequently, how widely, or how often particular phenomena occur are to be set aside in the interest of discovering, describing, and analyzing the structures, the machinery, the organized practices, the formal procedures, the ways in which order is produced. Structures of social action, once so discerned, can be described in formal, that is, structural, organizational, logical, atopically contentless, consistent, and abstract, terms. (Psathas, 1995, 2 - 3)

Fid�le en cela � son inspiration ethnom�thodologique, l'analyse conversationnelle observe un double principe : d'une part, elle reconna�t que l'action est situ�e, occasionn�e, sensible aux contingences et orient�e vers le contexte de sa production et vers sa sp�cificit� : elle est irr�m�diablement indexicale. D'autre part part, elle consid�re que cette action est localement organis�e gr�ce � des proc�d�s qui, eux, traversent les contextes de leur mise en oeuvre et se caract�risent non seulement par leur r�currence mais plus fondamentalement par leur syst�maticit�. La prise en compte de ces deux aspects ensemble - alors m�me qu'ils sont souvent trait�s comme contradictoires ou mutuellement exclusifs - est fondamentale pour appr�cier le programme de l'AC.

La linguistique interactionnelle appara�t dans ce contexte, en r�ponse � la question de savoir quel r�le, � la fois structurant et structur�, jouent les ressources grammaticales dans et pour l'organisation de l'interaction. Dans l'�mergence de ce courant, la publication de l'ouvrage collectif Grammar in Interaction, �dit� par Ochs, Schegloff & Thomspon (1996), fonctionne comme un d�clencheur, avec l'ambition de revisiter la grammaire � l'aune de l'interaction. Le terme de � linguistique interactionnelle � appara�t quelques ann�es plus tard (Mondada, 1998/2001 ; Selting & Couper-Kuhlen, 2001a, 2001b). Depuis, il a eu une fortune consid�rable, surtout en Europe, en parvenant � unifier un nombre croissant de chercheurs, autour d'un congr�s r�gulier (International Conference on Conversation Analysis, ICCA, Copenhagen, 2002, Helsinki, 2006, Mannheim, 2010) et avec des ouvrages collectifs de r�f�rence (Ochs, Schegloff, Thompson, 1996 ; Couper-Kuhlen & Selting, 2001 ; Ford, Fox, & Thompson, 2002, Hakulinen & Selting, 2005). L'objectif qui est poursuivi est double (cf. infra 5.) : d�crire la mani�re dont les structures formelles de la grammaire - entendues comme des ressources exploit�es par les participants - sont mobilis�es de mani�re � la fois ad�quate � et contrainte par l'organisation de l'interaction et, en retour, montrer comment l'organisation de l'interaction laisse �merger des formes et des emplois formels particuliers, r�pondant � des fonctionnalit�s interactionnelles.

La situation dans le domaine francophone est paradoxale : alors que les travaux s'int�ressant � l'interaction y apparaissent dans les ann�es 80, certains faisant une plus ou moins grande place � l'analyse conversationnelle et se diffusent largement dans les ann�es 90 (voir les travaux de Kerbrat-Orecchioni, 1990 - 94), les travaux d'analyse conversationnelle stricto sensu y sont moins nombreux. Aujourd'hui la production en linguistique interactionnelle est encore largement moins d�velopp�e � c�t� d'autres langues comme l'anglais, les langues scandinaves, le finnois, l'allemand ou le japonais.

L'importance des corpus de donn�es enregistr�es en contexte naturel

Malgr� la reconnaissance, d�s Saussure, de la langue parl�e comme objet premier de la linguistique, les normes de l'�crit on continu� pendant longtemps � configurer les mod�les du langage et de la langue (Harris, 1981, Linell, 2005). M�me si les technologies pour enregistrer la parole vive sont disponibles depuis tr�s longtemps - il suffit de penser � la cr�ation du Phonogrammarchiv de Vienne en 1899, de celui de Berlin en 1902 et des Archives de la parole par Ferdinant Brunot en 1911 ; mais aussi, en anthropologie, au fait que Haddon filme des danses et c�r�monies � Torres Strait d�s 1898 - ce n'est que � partir des ann�es 50 que ces techniques commencent � �tre syst�matiquement utilis�es par certains chercheurs. La Natural History of an Interview (McQuown, 1971), bas�e sur un entretien entre Bateson et Doris, une patiente, et film� en 1955, joue un r�le pionnier non seulement en tant que corpus enregistr� mais aussi pour l'exploitation syst�matique et interdisciplinaire qui en a �t� faite par ses auteurs - dont la tentative de codage des mouvements du corps par Birdwhistell est peut-�tre le plus connue (voir Mondada, 2006a, note 2, 315 - 316).

Depuis les ann�es 60, l'AC est le mouvement qui a le plus th�matis� l'importance des donn�es enregistr�es � naturelles �, condition sine qua non d'une �tude d�taill�e de l'interaction telle qu'elle est localement organis�e par les participants (Sacks, 1984). Sacks s'est int�ress� tr�s t�t aux possibilit�s d'utiliser non seulement le magn�tophone mais aussi la cam�ra (voir l'article de Sacks & Schegloff, 1971, publi� en 2002). Mais c'est Charles Goodwin, fort d'une formation professionnelle dans la production filmique, qui d�s les ann�es 70 r�alise un grand nombre de corpus vid�o (analys�s dans sa th�se, publi�e en 1981, mais aussi largement diffus�s dans la communaut� conversationnaliste).

L'importance que prennent les moyens d'enregistrement et par l� les exigences en mati�re de corpus (de � naturally occurring data �) va de pair avec une approche du langage comme pratique sociale : la langue, aux antipodes d'un syst�me abstrait, y est con�ue comme un ensemble de ressources indexicalement li�es aux conditions de leur usage, prenant sens dans l'action, et donc fortement li�e � sa temporalit� �mergente (cf. Mondada, 2005, 2006b).

Plus pr�cis�ment, la linguistique interactionnelle inspir�e de l'AC insiste tout particuli�rement sur l'importance d'observer les activit�s des participants dans des �v�nements de la vie sociale ordinaire, dans des naturally occurring interactions, c'est-�-dire des interactions qui auraient eu lieu m�me en l'absence du chercheur et qui n'ont pas �t� �licit�es ou orchestr�es par lui en vue de leur enregistrement. Cette exigence est articul�e de mani�re coh�rente avec les exigences de l'analyse. Une de ses raisons fondamentales rel�ve du caract�re � la fois context-free, context-shaped et context-renewing des pratiques des locuteurs : d'une part, celles-ci s'organisent de mani�re localement situ�e, au sens o� elles sont dot�es d'une indexicalit� in�vitable et g�n�ralis�e, en s'ajustant aux contingences affectant les �v�nements et les activit�s - tout en contribuant r�flexivement � en (re)d�finir le contexte. Transposer ces pratiques dans un autre contexte signifierait les alt�rer de mani�re radicale, puisqu'elles s'ajusteraient � d'autres contingences.

Ce qui constitue les donn�es a ainsi profond�ment chang� durant ces derni�res d�cennies en linguistique : on est pass� des exemples not�s � la vol�e, sans aucun enregistrement et donc sans aucune garantie quant � la pr�cision de la notation, � des enregistrements qu'on a eu tendance, pendant un certain temps, � d�laisser d�s qu'�tait �tablie leur transcription, ainsi autonomis�e, fondant l'analyse de chercheurs qui ne revenaient pas toujours aux bandes originales ; � des transcriptions alignant le texte avec sa source et permettant de mat�rialiser gr�ce � la technologie (gr�ce � des logiciels tels que CLAN, ELAN, Praat, ANVIL...) l'indissociabilit� entre donn�es primaires et donn�es secondaires, garantie d'un travail effectu� en r�f�rence constante aux donn�es enregistr�es.

L'AC est un des courants qui a massivement contribu� � attirer l'attention vers l'importance de la transcription soigneuse des donn�es, non seulement du point de vue de la repr�sentation du segmental, mais aussi de la temporalit� de son d�roulement pas � pas (chevauchements, pauses, acc�l�rations, d�c�l�rations, structures rythmiques). Celle-ci concerne aussi bien la parole que les autres ressources multimodales (gestes, regards, mimiques faciales, mouvements du corps, manipulations d'artefacts) qui pose des probl�mes complexes de repr�sentation d�taill�e de la coordination et synchronisation fine entre les participants (voir sur la transcription de donn�es interactionnelles en fran�ais Bonu, 2002, B�rki & De Stefani, 2006, Mondada, 2000, 2006a, 2007a).

Cette attention pour les donn�es s'incarne depuis les ann�es 60 dans une pratique d'analyse qui est indissociable de la pratique de la transcription et de l'enregistrement des donn�es : elle r�pond � l'exigence de travailler sur des donn�es dont on a une connaissance approfondie. N�anmoins, cela n'exclut pas que pour une syst�matisation des analyses (cf. infra), de grandes masses de donn�es soient n�cessaires, mises � disposition par des �changes informels entre chercheurs ou bien par des banques de donn�es con�ues � cet effet. C'est ainsi que sont apparues progressivement en linguistique des banques de donn�es accessibles sur Internet : celles-ci restent pour la plupart sp�cialis�es dans l'�crit ou constitu�es d'oral en grande partie �licit� (entretiens ou dispositifs exp�rimentaux) ; les banques de donn�es de corpus facilement accessibles � la communaut�, constitu�s de donn�es enregistr�es, en audio et en vid�o, d'interactions naturelles ne sont pas nombreuses sur le plan international : on mentionnera d'abord la TalkBank, d�velopp�e par Brian MacWhinney aux USA, qui en est l'exemple le plus ancien, dont les corpus sont unifi�s gr�ce au recours au logiciel CLAN - pour lequel une version sp�cialement am�nag�e pour l'AC a �t� d�velopp� avec Johannes Wagner (CLAN_CA). On mentionnera aussi la banque de donn�es CLAPI (Corpus de LAngue Parl�e en Interaction), d�velopp�e par le groupe ICOR du laboratoire ICAR � Lyon, qui est une plateforme qui articule une archive de corpus d'interactions en milieu naturel et des moteurs de recherche en permettant l'exploitation outill�e.

Vers des analyses syst�matiques

Sur la base de ces mat�riaux recueillis au fil de � naturally occurring interactions �, l'AC se caract�rise par deux proc�dures analytiques : la premi�re consiste � proposer une single case analysis, portant sur une donn�e qui est parcourue dans sa complexit� ; la seconde consiste � effectuer une � analyse de collection � qui se focalise sur un ph�nom�ne particulier dans des donn�es diff�rentes et qui vise � en montrer la syst�maticit�. Dans la premi�re, � the resources of past work on a range of phenomena and organizational domains in talk-in-interaction are brought to bear on the analytic explication of a single fragment of talk � (Schegloff, 1987 : 101) alors que la seconde consiste � utiliser � a set of fragments, then, to explicate a single phenomenon or a single domain of phenomena � (1987 : 101). Alors que la premi�re fa�on de faire exploite les connaissances analytiques existantes pour comprendre un cas singulier dans sa complexit� et pour �noncer des conjectures, la seconde permet d'envisager l'�tude d'un objet in�dit dans sa syst�maticit� et g�n�ralit�.

La premi�re proc�dure a �t� privil�gi�e lors de la r�ception de l'AC : elle renvoie � l'attention pour la dimension indexicale de l'organisation conversationnelle, se traduisant par une attention aux d�tails particuliers qui fondent l'agencement de tel ou tel extrait enregistr� d'un corpus. En revanche, la seconde, qui prolonge la premi�re et s'incarne dans l'�laboration de collections, se traduisant par une exigence de d�monstration du caract�re r�current et syst�matique des ph�nom�nes d'ordre, a �t� davantage ignor�e (cf. Bonu, �d., � para�tre pour un panorama sur la production francophone).

Pourtant cet aspect est central d�s les premiers travaux de l'AC dans les ann�es 60, comme en t�moignent les Lectures de Sacks (1992). Il y parle de l'objectif de l'AC visant � d�crire une � technologie � voire une � machinerie � de la conversation, i.e. un � apparatus �, un � ensemble de m�thodes � qui puisse renvoyer � la mani�re dont les instances observ�es ont �t� produites. Ces objectifs ont le m�rite de clarifier le fait que pour Sacks le but de l'AC n'a jamais �t� de se limiter � d�crire aussi pr�cis�ment soit-il une situation particuli�re ; le but reste - comme chez Garfinkel - la description de � proc�d�s �, qu'il appelle des � m�thodes � (des � ethnom�thodes �), qui produisent les instances observ�es (Schegloff, 1992b : 1338 parle de � procedural infrastructure of interaction �).

Ainsi Sacks caract�rise son travail analytique comme visant une description de la fa�on dont les membres parviennent � produire m�thodiquement une action reconnaissable comme telle. Par exemple, en travaillant sur des instances d'� invitations �, le focus n'est pas mis sur un � �nonc� � en tant que tel qui permettrait de r�aliser l'invitation, ou sur l'�tablissement de d�finitions g�n�rales et constitutives de verbes de parole, � la mani�re des actes de langage (Schegloff, 1992a, I, xxvi), mais sur les m�thodes qui produisent des �nonc�s reconnaissables et reconnus par les participants comme une invitation (Sacks, II, 367). Ces m�thodes permettent �ventuellement de distinguer les invitations surgissant de l'interaction (� generated in that interaction �) des invitations dont l'�nonc� est planifi� � l'avance, voire qui sont le but de l'interaction (comme les invitations plac�es dans la raison de l'appel t�l�phonique) - les deux recevant des r�ponses diff�rentes et g�n�rant ainsi une suite d'actions diff�rente, ayant des trajectoires s�quentielles propres (Sacks, 1992, 1, 792 - 3 ; II, 210).

Cette analyse ne part pas d'un exemple d'invitation typique produit par introspection ; elle ne consiste pas � identifier comme point de d�part un type d'action. En revanche, elle se penche sur une occurrence particuli�re, attest�e dans un corpus, pour se demander comment elle a �t� produite m�thodiquement et de mani�re situ�e (le caract�re m�thodique �tant responsable de la syst�maticit� des proc�d�s, alors que le caract�re situ� rel�ve de l'agencement indexical et contingent des d�tails en situation). Une fois identifi�e et analys�e cette occurrence, il s'agit de construire une collection d'occurrences similaires, qui sont reconnues par les participants comme des accomplissements reconnaissables de la m�me action.

La construction d'une collection vise ainsi � explorer l'organisation r�currente d'un ph�nom�ne dans plusieurs fragments de corpus, en ob�issant � un certain nombre d'exigences qui fondent la � mentalit� analytique � particuli�re de l'AC et que nous allons rappeler bri�vement, en retra�ant la mani�re dont Schegloff (1996a) organise son analyse exemplaire d'une pratique particuli�re, � confirming allusions �. Il identifie cette pratique en rep�rant dans son corpus un ensemble de r�p�titions d'un segment pr�alable, identifi� comme ce qui �tait vis� dans le tour pr�c�dent, afin de ratifier les allusions qu'il contenait implicitement/qu'il laissait entendre. Cette r�p�tition est une pratique qui permet de r�aliser une action particuli�re, confirmer les allusions, apparemment minimale et optionnelle mais qui fait partie du � r�pertoire culturel � des locuteurs (Schegloff 1996a : 209) et qui permet de traiter le th�me important de l'implicite. Au moment de commencer l'enqu�te, Schegloff n'avait pas la moindre id�e qu'il pouvait y avoir une action de ce type dans notre soci�t�, il ne la pr�supposait pas, n'en cherchait pas des occurrences pour l'illustrer, ne pouvait pas l'imaginer. D'ailleurs, cette action ne re�oit pas de nom, de cat�gorie m�tapragmatique en langue : pour la d�couvrir, il n'aurait pas pu se baser sur � our vernacular understanding of typicalized couses of action � (Schegloff 1996 : 211). Et pourtant, ce sont de telles actions qui constituent une soci�t� dans son fonctionnement moment par moment dans l'interaction (et non telle qu'elle a �t� d�finie comme un objet disciplinaire d'�tude).

On notera que le � ph�nom�ne � ainsi d�couvert est une � pratique �, qui impl�mente, accomplit, r�alise une � action � : en sont des exemples, outre les �tudes de collections d'ouvertures et de confirmation des allusions que nous avons d�j� cit�es, les analyses des �valuations (assessements) par Pomerantz (1984), des r�parations par Schegloff (1979, 1992b, etc.), de l'annonce de mauvaises nouvelles par Maynard (1997), de yes/no questions par Koshik (2000), ou de la raison de l'appel t�l�phonique (Couper-Kuhlen, 2001).

On notera que l'analyse d'un � ph�nom�ne � ne porte pas a priori sur une � forme � : plus facilement recherchable dans un grand corpus, une forme ne constitue toutefois pas un point de d�part de l' � unmotivated looking �. La raison en est que g�n�ralement une forme isol�e ne r�alise pas en elle-m�me une action. Les formes du langage sont plut�t des � ressources � qui accomplissent des actions de par leur position particuli�re au sein d'une pratique et au sein d'une s�quence particuli�re. M�me si dans la litt�rature conversationnelle un certain nombre de formes ont fait l'objet d'analyses syst�matiques en collections - comme � oh � (Heritage, 1984, 1998, 2002) - il est significatif qu'elles l'aient �t� en rapport avec un positionnement s�quentiel particulier (1984), par exemple en r�ponse � une question (1998) ou � une �valuation (assessment, 2002) : c'est en tant que r�ponse � un assessment par exemple que � oh � devient une � m�thode � pour moduler l'accord et le d�saccord entre les participants.

Une fois identifi�e une pratique - qui peut �tre effectu�e en mobilisant des ressources grammaticales r�currentes, mais pas uniquement - il s'agit de v�rifier qu'elle est bien une instance de l'action sur laquelle porte la collection, en montrant qu'elle a �t� reconnue comme telle par les participants. L'orientation des participants - le caract�re emic des ph�nom�nes �tudi�s - fonctionne ainsi comme une proc�dure de v�rification et de preuve, incarn�e par et dans les tours suivants, qui manifestent le type d'action accomplie par le tour pr�c�dent et sa compr�hension par les participants. On voit donc bien que le caract�re reconnaissable de l'action pour les participants est �troitement li� aux caract�ristiques de l'environnement s�quentiel de la pratique �tudi�e (ce qui pr�c�de, ce qui suit, les caract�ristiques du formatage du tour, son insertion dans un type de s�quence, etc.), qui constitue l'objet de la description syst�matique.

L'analyse de collections constitue la mani�re sp�cifique � l'analyse conversationnelle de produire un ensemble syst�matique et cumulatif de connaissances sur l'organisation s�quentielle des ressources linguistiques en interaction. Ces connaissances sont souvent produites sur la base de grandes masses de donn�es ; si elles donnent lieu � ce que l'on a appel� une quantification � informelle � (expression de fr�quences et d'estimations quantitatives sous forme descriptive mais non chiffr�e), leur quantification est sujette � d'importantes discussions, qui ne nient pas a priori l'int�r�t de ce type de g�n�ralisation mais qui en interrogent critiquement les conditions. Ainsi dans un article fameux, Schegloff (1993) �nonce les probl�mes � r�soudre pr�alablement � la quantification - identification d'un d�nominateur commun, d�fini comme l'environnement s�quentiel sp�cifique des occurrences retenues, d�finition d'un num�rateur, ou de la s�rie d'items comptant comme des occurrences du ph�nom�ne ; d�limitation d'un domaine d'activit� organisationnellement pertinent pour le ph�nom�ne d�crit. Ces pr�alables montrent que la constitution d'une collection (core collection, une fois r�solus les probl�mes de boundary instances), au sens technique de l'AC, est bien l'�tape analytique indispensable pour pouvoir songer � une quantification (voir Robinson, 2007 sur ce point et Haakana, 2002 pour une discussion sur la possibilit� de quantifier les rires).

Une grammaire-en-interaction encore fragmentaire
Au fondement de l'organisation de l'interaction : la machinerie des tours et les unit�s de construction du tour

En d�crivant la � machinerie � de l'alternance des tours de parole, Sacks, Schegloff et Jefferson remarquent que a) les locuteurs alternent r�guli�rement au cours de la conversation, b) g�n�ralement une seule partie parle � la fois, c) le passage d'un tour � l'autre se fait en minimisant les chevauchements et les silences (1974 : 700). La question ouverte par ces constats apparemment tr�s simples consiste � se demander comment les locuteurs effectuent cette alternance d'un tour � l'autre avec pr�cision, syst�maticit� et m�thodicit�, sans qu'ils aient � se concerter d'avance ou � en th�matiser explicitement le moment et la mani�re. La r�ponse � cette question a �t� cruciale pour l'essor de l'analyse conversationnelle et de la linguistique interactionnelle, puisqu'elle a fond� une analyse des ressources linguistiques telles que trait�es par les participants aux fins pratiques de la gestion du turn-taking.

Depuis l'article princeps sur la � machinerie de l'alternance des tours � (Sacks, Schegloff, Jefferson, 1974), la notion de TCU (turn-constructional unit) a �t� reconnue comme d�finissant l'unit� interactionnelle minimale pour les participants ordonnant leurs contributions � la conversation. Le syst�me du turn-taking se base en effet sur deux composantes, l'une responsable de la composition des tours (turn-constructional component), l'autre de leur allocation (turn-allocation component). La premi�re permet de rendre compte de la fa�on dont les participants parviennent � identifier le moment o� l'alternance du tour peut avoir lieu, en r�duisant � la fois les chevauchements et les silences. L'efficacit� de la machinerie du turn-taking repose sur une analyse (par les participants) temporellement tr�s pr�cise du d�roulement de la parole, permettant la projection de la compl�tude des unit�s de construction du tour en train d'�merger dans la parole, d�gageant ainsi des possibles points de transition pertinents (transition-relevance places, TRP).

La question des TCU est fondamentale pour la linguistique interactionnelle parce qu'elle montre que � given conversation as a major, if not THE major, locus of language's use, other aspects of language structure will be designed for conversational use and, pari passu, for turn-taking contingencies � (Sacks, Schegloff, Jefferson, 1974 : 722) et que donc non seulement l'organisation interactionnelle exploite la structure des ressources langagi�res existantes mais aussi, et en retour, que les structures de la langue sont configur�es de sorte � remplir leurs fonctionnalit�s interactionnelles. Dans l'article sur le turn-taking, les TCUs sont d�finis pour la premi�re fois de cette mani�re :

There are various unit-types with which a speaker may set out to construct a turn. Unit-types for English include sentential, clausal, phrasal, and lexical constructions (cf. 4.13 below). Instances of the unit-types so usable allow a projection of the unit-type under way, and what, roughly, it will take for an instance of that unit-type to be completed. (1974 : 702). As for the unit-types which a speaker employs in starting the construction of a turn's talk, the speaker is initially entitled, in having a turn, to one such unit. The first possible completion of a first such unit constitutes an intial transition-relevance place. Transfer of speakership is coordinated by reference to such transition-relevance places, which any unit-type instance will reach. (1974 : 703).

La premi�re caract�risation des TCUs est donn�e en termes syntaxiques par Sacks, Schegloff et Jefferson, dont le mod�le � identifies the types of turn-constructional units as sentential, clausal, phrasal, and lexical - i.e. syntactically � : son traitement � should indicate the deep ways in which syntax matters to turn-taking, albeit a syntax conceived in terms of its relevance to turn-taking. � (1974 : 720 - 721). Cette primaut� de la syntaxe est compl�t�e par la r�f�rence � la prosodie : � Clearly, in some understanding of 'sound production' (i.e. phonology, intonation, etc.), it is also very important to turn-taking organization. For example, discriminations between "what" as a one-word question and as the start of a sentential (or clausal or phrasal) construction are made not syntactically but intonationally. When it is further realized that any word can be made into a 'one-word' unit-type, via intonation, then we can appreciate the partial character of the unit-types' description in syntactic terms � (1974 : 721 - 722).

Cons�quences pour la description de la grammaire en interaction

Cette caract�risation initiale des TCUs a port� au d�veloppement d'une litt�rature importante, qui a d�velopp� plusieurs paliers d'analyse, en insistant sur les interfaces entre eux :

une syntaxe pour l'interaction, fond�e sur une conception 'incr�mentale' et projective de la syntaxe (Auer, 2005) : elle rend compte de la mani�re dont les constructions syntaxiques se construisent en temps r�el, pas � pas, au fil du d�roulement des activit�s interactionnelles des participants et en �tant sensible � leurs contingences. Au sein de cette syntaxe, les constructions sont d�crites par rapport � leur potentiel projectif (Schegloff, 1996 ; Auer, 2002). des r�flexions sur l'articulation entre syntaxe et prosodie (Ford & Thompson, 1996, Selting, 2000), avec des discussions sur la priorit� �ventuelle de l'une sur l'autre - donnant lieu au d�veloppement important de la prosodie interactionnelle (Couper-Kuhlen & Selting (eds) 1996) ainsi que de la phon�tique interactionnelle (Local & Kelly, 1986, Local et alii, 1986). des r�flexions sur le fait que le TCU est localement d�fini par un cluster de dimensions � diff�rents niveaux (Ford, Fox, Thompson, 1996), que les participants traitent de mani�re holiste : outre les dimensions syntaxique et prosodique, interviennent les dimensions s�mantique (la compl�tude envisag�e du point de vue du sens) et pragmatique (la compl�tude entendue du point de vue de l'action r�alis�e par l'unit�, cf. Ford & Thompson, 1996 : 148), auquel s'ajoute plus tardivement la multimodalit� (mais voir d�j� Ford, Fox, Thompson, 1996). des r�flexions sur la contribution de la multimodalit� � cette structuration linguistique des TCU et des tours (Goodwin, 1981 ; Streeck & Hartge, 1992, Mondada, 2004, 2007a ; Schmitt, 2005) - constituant un terrain fertile pour l'�tude des projections et des anticipations qui structurent de mani�re flexible les tours comme les TCUs et d�finissent dynamiquement la compl�tude d'unit�s � plusieurs niveaux.

Du point de vue de la linguistique interactionnelle, il ne faut pas oublier que la d�finition des TCUs et des TRPs reste un accomplissement pratique des membres - et que cette d�finition prax�ologique prime sur les consid�rations formelles qu'il serait possible d'�noncer sur la compl�tude de l'unit�. Cela signifie que les propri�t�s formelles du tour ne sont pas un ensemble de param�tres pouvant �tre �valu�s de mani�re exog�ne par l'analyste, mais plut�t un ensemble de ressources des participants, soumises � leur appr�ciation. Autrement dit, les TCUs concernent moins des structures formelles que des pratiques m�thodiquement organis�es des locuteurs (Ford, Fox, Thompson, 1996 : 431 ; Ford, 2004).

Cette dimension prax�ologique a comme cons�quence que plut�t que de vouloir circonscrire des unit�s, l'objectif de l'analyse est de caract�riser des pratiques de construction du tour et de l'activit� effectu�e dans et par le tour ; plut�t que de viser des crit�res n�cessaires et suffisants de segmentation d'unit�s, d'identifier des pratiques qui accomplissent la compl�tion ou la continuation d'une unit�.

De ce point de vue, des convergences aussi bien que des divergences entre dimensions sont observables : alors que la syntaxe peut indiquer une articulation en plusieurs unit�s, la prosodie, la relation s�quentielle avec ce qui pr�c�de ou la gestualit� peuvent indiquer une continuation de l'unit� : ces divergences peuvent �tre amplifi�es par l'interpr�tation en temps r�el des co-participants, qui peuvent privil�gier l'une ou l'autre lecture aux fins pratiques de leur propre action - par exemple pour prendre ou ne pas prendre le tour.

En particulier, le locuteur peut intervenir sur la forme qu'est en train de prendre le tour et ses TCUs, en la transformant - par exemple en produisant une expansion ou bien en choisissant un format plus compact (Sacks, Schegloff, Jefferson, 1974 : 726), qui changent les conditions auxquelles les co-participants peuvent ou non prendre la parole.

Ainsi, Local & Kelly (1986) montrent que le silence suivant une conjonction peut �tre configur� de sorte � faire l'objet de deux analyses possibles mais oppos�es : d'une part les participants peuvent traiter ce silence comme projetant quelque chose � venir de la part du locuteur (et, dans ce cas, comme ne repr�sentant pas des TRP) ; d'autre part, ce silence peut �tre produit, gr�ce � des caract�ristiques phon�tiques sp�cifiques, comme permettant une alternance du tour. Dans un cas on pourra le traiter comme une pause appartenant au tour in fieri, dans l'autre comme une pause inter-tour offrant un TRP.

Cela produit, en d�finitive, une � ultimate 'indefinability' of TCUs [which] is essential to their functionality. Interactants regularly extend, foreshorten, reanalyze, and repair their developing turns in response to contingencies emergent at particular points in particular conversations � (Ford, Fox, Thompson, 1996 : 428) ; � thus projection creates a manipulable potential end point, a provisional and negotiable goal that can be confirmed or manipulated through the same practices that produced it in the first place � (1996 : 449).

D�veloppements ult�rieurs

Plus g�n�ralement, l'essor de la linguistique interactionnelle permet aujourd'hui d'interroger de mani�re coh�rente la relation entre

des ressources linguistiques (des configurations formelles, des formes lexicales, des constructions syntaxiques) et multimodales (dans des associations entre par exemple certaines formes verbales et des ph�nom�nes gestuels ou visuels con-comitants), des environnements s�quentiels (des positions au sein du tour, de la s�quence ou de l'activit�), des actions accomplies par les participants.

Si la d�marche consistant � constituer des collections invite � articuler �troitement ces trois dimensions, on remarque au sein de la linguistique interactionnelle contemporaine des variations - relevant souvent de la mani�re dont les auteurs se positionnent vis-�-vis d'autres recherches en linguistique et d�finissent par cons�quent leur objet - quant � la dimension qui est privil�gi�e et qui structure l'analyse.

Une premi�re strat�gie consiste � se focaliser sur une forme, ensuite explor�e dans les s�quences qui la caract�risent et les actions qu'elle contribue � effectuer : cela repr�sente une mani�re de proc�der align�e avec la tradition linguistique, permettant dans certains cas de revisiter le traitement fonctionnel qui en a �t� propos� par elle (cela a �t� privil�gi� par les travaux sur les connecteurs et marqueurs linguistiques, comme � actually �, Clift, 2001 ; � obwohl � G�nther, 1999 ; en fran�ais � ben � ou � voil� � Bruxelles et Traverso, 2001, 2006, Groupe ICOR, 2008 ; � attends �, Groupe ICOR 2007, ou par les travaux sur certaines constructions syntaxiques, comme en fran�ais les dislocations � gauche, Fornel, 1988, Pekarek, 2001 ou la dislocation � droite, Horlacher, 2008).

Une seconde strat�gie consiste � se focaliser sur des s�quences particuli�res : cette mani�re de proc�der s'aligne avec la tradition de l'analyse conversationnelle et privil�gie des environnements s�quentiels particuliers, que ce soient des positionnements s�quentiels au sein du tour (Schegloff, 1996b, Auer, 1996 ; en fran�ais Mondada, 2007b, � para�tre), des s�quences sp�cifiques (voir par exemple les nombreuses analyses des s�quences de r�paration, et leur contribution � l'�tude de la syntaxe : Schegloff, 1979, Fox & Jasperson, 1995, Egbert, 1997, Wu, 2007 ; en fran�ais voir les travaux de G�lich, 1986, G�lich & Kotschi, 1987 sur la reformulation), ou des ph�nom�nes s�quentiels particuliers (comme les chevauchements, Schegloff, 2000, en fran�ais Oloff, � para�tre).

Une troisi�me angle d'approche consiste � adopter comme point de d�part une action ou la structuration d'une activit�, pour y analyser les types de ressources mobilis�es pour les accomplir (par exemple les plaintes, Drew, 1998, les offres Curl, 2006 ; par exemple la structuration des activit�s en transitions d'un �pisode � un autre, Bruxelles, Greco, Mondada, � para�tre, Mondada, 2006c, Mondada & Traverso, 2005, en s�quences d'ouverture, Schegloff, 1968 ; en fran�ais et en allemand Mondada & Schmitt � para�tre ; ou de cl�ture, Schegloff & Sacks, 1973, en italien De Stefani, 2006). L'analyse multimodale complexifie encore davantage ce paysage : les analyses des ressources gestuelles, visuelles, actionnelles se focalisent sur des clusters de ph�nom�nes concomitants et coordonn�s au sein d'actions particuli�res, sans oublier la mat�rialit� et la spatialit� du contexte o� elles sont accomplies (sur l'importance des d�placements, par exemple, voir une r�analyse de la deixis spatiale Mondada, 2005b, du rapport entre construction du tour et d�placement dans l'espace, Relieu, 1999, du rapport entre mouvement et organisation des tours De Stefani & Mondada, 2007).

Ces diff�rentes options ne se contredisent pas en principe mais produisent des d�veloppements cumulatifs distincts, ayant des implications th�oriques diff�rentes pour la pens�e et l'approche de la langue en interaction.

Conclusion : une approche �mergentiste du langage

Une telle conception de la parole en interaction rel�ve plus g�n�ralement d'une approche des structures du langage qui consid�re non seulement que les premi�res sont s�lectionn�es, mobilis�es, exploit�es de mani�re fonctionnelle � l'interaction mais, plus radicalement, qu'elles sont configur�es, en tant que structures, d'une mani�re sensible � leur usage prototypique dans l'interaction. Comme le dit Schegloff,

� it would hardly surprise us if some of the most fundamental features of natural language are shaped in accordance with their home environment in copresent interaction, as adaptations to it, or as part of its very warp and weft (Schegloff, 1989 : 142 - 4, 1991 : 153 - 5). For example, if the basic natural environment for sentences is in turns-at-talk in conversation, we should take seriously the possibility that aspects of their structure - for example, their grammatical structure - are to be understood as adaptations to that environment. In view of the thoroughly local and interactional character of the organization of turn-taking in conversation (SSJ, 1974), the grammatical structures of language should in the first instance be understood as at least partially shaped by interactional considerations (Schegloff, 1979). And one locus of those considerations will be the organization of the turn, the organizational unit which 'houses' grammatical units � (1996a : 54 - 55).

Cette vision est proche de celle d�fendue par Hopper de la � grammaire �mergente � (1987), par laquelle il critique une grammaire bas�e sur un syst�me fixe voire fig�, pour inviter � penser la grammaire en relation avec les exp�riences des locuteurs en action, comme r�pondant aux contraintes et aux pressions exerc�es par le discours. Dans la perspective interactionnelle, cela am�ne � consid�rer que � it seems appropriate that grammar would arise from, or emerge from, a dynamic constellation of interactional practices � (Fox, 2007 : 302). Cette conception �mergentiste peut se penser � deux niveaux distincts mais interreli�s :

au niveau de l'organisation des �nonc�s et des tours de parole en interaction, pensables en tant que se structurant progressivement au fur et � mesure que progresse la production du tour, de mani�re incr�mentale, enrichie mais aussi negoci�e, confirm�e, ou d�vi�e par les contingences de la temporalit� de l'interaction. Ce niveau permet d'appr�hender les choix linguistiques situ�s des locuteurs dans leur action - et donc leurs innovations langagi�res individuelles, plus ou moins conjoncturelles. Dans cette �mergence �v�nementielle, on peut d�crire l'apparition de nouvelles constructions syntaxiques, qu'elles soient ou non retenues par le cours de l'histoire (soit parce que les locuteurs cessent de parler ainsi, soit parce que les institutions rejettent ces constructions nouvelles). Ce qui importe pour l'�mergence conjoncturelle, ce n'est pas la long�vit� des formes mais la mani�re dont elles viennent au jour. De plus, la notion de grammaire �mergente est utile au niveau de comportements syst�matiques et r�p�titifs de Gestalten constitu�es par des formes particuli�res observables dans des environnements s�quentiels et actionnels particuliers. Ces Gestalten constituent des ensembles de formes-dans-des-actions qui d�passent les innovations individuelles. Leur r�currence permet d'observer une stabilisation dans certains contextes - d�crits en respectant les ajustements � des contraintes prax�ologiques particuli�res. Ils peuvent constituer le d�but d'un processus de grammaticalisation (cf. � it seems appropriate that grammar would arise from, or emerge from, a dynamic constellation of interactional practices � Fox, 2007 : 302) (cf. G�nthner, 1999, Gohl & G�nthner, 1999 ; Groupe ICOR, 2007 pour des exemples).

Une premi�re cons�quence en est que la grammaire est con�ue comme un ensemble de ressources interactionnelles, non seulement actualis�es, non seulement mobilis�es mais aussi configur�es en r�ponse aux contingences de l'interaction ; cette grammaire partage avec les unit�s interactionnelles les caract�ristiques de l'indexicalit�, de la plasticit�, de l'ajustement aux contraintes prax�ologiques.

Une seconde cons�quence concerne la d�finition m�me de ces ressources : s'il s'agit de consid�rer les ressources effectivement mises en oeuvre par les locuteurs dans l'organisation de leurs tours en interaction, alors il n'y a aucune raison de s�parer d'un c�t� ressources � verbales � et de l'autre ressources � non-verbales �. Une approche de la multimodalit� permet pr�cis�ment de traiter ensemble les ressources grammaticales, prosodiques et corporelles (gestes, regards, mimiques faciales, mouvements de la t�te, postures corporelles, etc.) que les participants mettent en oeuvre de mani�re holiste dans l'organisation m�thodique de leur conduite, dans une orientation commune vers les opportunit�s et les contraintes �mergeant de l'interaction. Une telle conception des ressources ne se situe pas en dehors de la linguistique mais la rend simplement moins logocentrique.

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